ETATS-UNIS: Obama se sépare de son secrétaire à la Défense

Le président Barack Obama a annoncé ce lundi 24 novembre le départ de son secrétaire à la Défense Chuck Hagel sur fond de divergence de vues dans la lutte contre le groupe Etat islamique (EI) en Irak et en Syrie.

Cet ancien du Vietnam, réticent à engager l’armée américaine dans des conflits, était arrivé à la tête du Pentagone il y a moins de deux ans, avec comme mission principale de réduire la voilure et de mener à bien le retrait des soldats américains d’Afghanistan.

Le lancement, début août, d’une campagne de frappes aériennes contre les djihadistes de l’EI en Irak d’abord puis en Syrie voisine ensuite, a profondément changé la donne.

«J’ai présenté ma démission aujourd’hui», a déclaré Chuck Hagel au cours d’une brève déclaration à la Maison-Blanche aux côtés de Barack Obama. Celui-ci a rendu hommage à un «secrétaire à la Défense exemplaire» et un «ami». Seul républicain du cabinet Obama, Hagel restera à son poste jusqu’à ce que son remplaçant soit confirmé par le Sénat.

«Un autre type d’effort»

Michele Flournoy, une ex-sous secrétaire à la Défense, figure parmi les noms les plus fréquemment cités pour le remplacer. Jack Reed, sénateur démocrate du Rhode Island et ancien membre d’une unité d’élite de parachutistes, et Ashton Carter, ancien secrétaire adjoint à la Défense, sont aussi évoqués.

Selon des responsables américains cités par le New York Times, la décision de Barack Obama de se séparer de Chuck Hagel est liée à sa volonté d’avoir un nouveau profil à la tête du Pentagone pour mener à bien l’opération militaire engagée en Irak et en Syrie. «Les deux années à venir vont demander un autre type d’effort», a souligné l’un d’entre eux sous couvert d’anonymat.

Nettement moins charismatique que son prédécesseur Leon Panetta, parfois assez confus en conférence de presse, donnant souvent l’impression de subir les décisions plutôt que de donner l’impulsion, Chuck Hagel semble avoir eu du mal à se faire une place dans le premier cercle du président américain.

Réflexion plus large contre l’EI

«Je sais qu’il était très très frustré», a réagi le sénateur républicain John McCain, ancien candidat à la Maison-Blanche, très critique de la politique étrangère de Barack Obama. «Il n’a jamais pu entrer dans le cercle resserré à la Maison-Blanche qui prend toutes les décisions», a ajouté John McCain, lui aussi un ancien combattant du Vietnam.

Le président de la Chambre des représentants des Etats-Unis, le républicain John Boehner, a jugé que ce changement à la tête du Pentagone devait s’accompagner d’une réflexion plus large sur la stratégie américaine face à l’EI. «Nous ne pouvons vaincre l’ennemi sans un effort coordonné et réfléchi qui bénéficie du soutien massif du peuple américain. A ce jour, cette administration n’a pas réussi», a-t-il estimé.

Sur Twitter, des djihadistes ont salué cette démission, jugeant qu’elle représentait une victoire pour l’EI. «Connaissez-vous une autre organisation qui peut obliger une administration américaine à virer son ministre de la Défense?», a lancé l’un d’eux.

Hostile à l’interventionnisme

Chuck Hagel a grandi dans la pauvreté avec un père alcoolique et parfois violent, et s’est façonné au Vietnam. Dans la jungle du delta du Mékong, il a été blessé à deux reprises, se voyant décerner autant de médailles Purple Heart. De retour du Vietnam, il enchaîne les petits boulots avant de décrocher un emploi dans l’équipe d’un sénateur du Nebraska, où il se fait remarquer.

A l’arrivée de Ronald Reagan au pouvoir, au début des années 80, il devient numéro deux du ministère des Anciens combattants et n’hésite pas à démissionner pour dénoncer les coupes dans les pensions des vétérans. Il passe alors dans le privé, créant une société de téléphonie mobile qui le rendra millionnaire.

Au Sénat (1996-2008), où il est membre de la commission des Affaires étrangères, Chuck Hagel se lie d’amitié avec le républicain John McCain, le démocrate Joe Biden, ou encore Barack Obama qu’il accompagne lors de visites de terrain en Irak et en Afghanistan.

Hostile à un interventionnisme à tout crin, il s’était rapidement opposé à la politique de George W. Bush en Irak, s’attirant les critiques de son camp.

(afp/Newsnet)