L’accord sur le nucléaire iranien est renvoyé à l’été

Une semaine de négociations intenses à Vienne n’aura pas suffi. Le contentieux du programme nucléaire iranien – vieux de dix ans déjà – n’est toujours pas résolu. L’échéance d’un accord est une nouvelle fois repoussée au 30 juin prochain. Cette nouvelle ne facilitera pas la tâche des négociateurs à Washington et Téhéran. En janvier, un Congrès à majorité républicaine dans les deux chambres sera en effet plus enclin à alourdir les sanctions déjà prises. Tandis qu’à Téhéran, l’échec du président Rohani va être exploité par ses ennemis conservateurs. Le président iranien avait fait d’une levée des sanctions qui pèsent sur l’économie et les ménages, le principal objectif de son mandat. C’est raté.

En attendant, l’accord intérimaire de Genève court toujours: certaines activités nucléaires iraniennes sont gelées en échange d’une levée partielle des sanctions. Cela était confirmé ce lundi par l’annonce d’un dégel des avoirs iraniens de 678 millions de dollars durant la poursuite des négociations qui pourraient donc reprendre en décembre. Mais pourquoi est-il si difficile pour le Groupe 5+1 (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Grande-Bretagne et l’Allemagne) et l’Iran de tomber d’accord, alors que tout le monde semble y trouver un intérêt?

Grégoire Mallard, professeur associé au Graduate institute de Genève, pense que des enjeux plus globaux parasitent la question des seules capacités de Téhéran à enrichir l’uranium et à se tenir ou pas au seuil de l’acquisition d’une arme atomique. «Washington veut montrer que le modèle des sanctions graduelles appliqué à l’Iran marche et peut être appliqué à d’autres pays et pour d’autres violations du droit international», explique l’enseignant. «Cela implique que les sanctions ne peuvent être levées d’un coup, comme le souhaiterait Téhéran. Ce serait d’ailleurs impossible à faire. Le président peut certes défaire celles qu’il a décidées. C’est plus difficile pour celles votées par le Conseil de sécurité de l’ONU. D’autant que la Russie critique déjà une dérive de ce modèle qui s’applique pour la crise ukrainienne. Et que la France, autre membre permanent du Conseil de sécurité, se montre très restrictive sur la capacité d’enrichissement de l’uranium de Téhéran. C’est encore plus difficile de revenir sur les mesures votées par un Congrès probablement plus hostile à ces négociations en janvier».

«Pour régler le problème régional, reprend Grégoire Mallard, il faudrait introduire les acteurs régionaux, certes consultés, mais qui ne sont pas partie prenante des discussions». Il écarte au passage le risque de prolifération au Moyen-Orient, une menace souvent agitée comme un épouvantail. «Israël ne parle plus de frapper des sites iraniens. Et l’Arabie saoudite qui a participé au financement de la bombe pakistanaise, peut invoquer ce parapluie nucléaire secret d’Islamabad, sans avoir à mener son propre programme, si les choses se gâtent».

(24 heures)