
La première journée du Conseil ministériel de l’OSCE jeudi 4 décembre à Bâle a été marquée par une attaque oratoire groupée contre la Russie, membre elle aussi de l’organisation.
La crise ukrainienne était sur toutes les lèvres, avec comme exigence de base le respect des accords de Minsk. Si la discussion n’est pas rompue, les fronts ne se sont pas assouplis pour autant.
Didier Burkhalter critique fermement la Russie
Alors que commençait la longue série de déclarations des représentants de chaque pays en séance plénière, retransmise par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) sur des écrans pour les journalistes, une constante se dessinait: de nombreux orateurs, le conseiller fédéral et président en exercice de l’OSCE Didier Burkhalter en tête, ont pointé du doigt la Russie comme agresseur en Ukraine et son annexion «illégale» de la Crimée.
La cheffe de la diplomatie européenne Federica Mogherini et son homologue allemand Frank-Walter Steinmeier ont condamné la violation territoriale de l’Ukraine par la Russie et exigé la mise en œuvre des accords de Minsk (cessez-le-feu conclu en septembre). Leur homologue américain John Kerry a abondé dans ce sens, soulignant que «personne ne veut la confrontation ou l’isolement de la Russie».
Contre-attaque russe
Principal concerné, le ministre ukrainien des affaires étrangères Pavlo Klimkin a lancé un vibrant appel à la communauté internationale pour renforcer les pouvoirs de l’OSCE afin qu’elle puisse prendre des mesures décisives. Il a accusé Moscou d’avoir violé les principes d’Helsinki et d’être responsable de l’escalade dans l’Est ukrainien qui a «sapé la sécurité en Europe».
La réponse russe n’a pas tardé: son chef de la diplomatie Sergueï Lavrov a rejeté une bonne partie de la responsabilité du conflit sur l’Union européenne, rappelant qu’«il y a un an, on aurait pu éviter le drame». Mais l’UE a «bloqué les discussions trilatérales» entre Kiev, les séparatistes ukrainiens et Moscou et «appuyé un coup d’Etat», a soutenu Sergueï Lavrov.
Aujourd’hui, a-t-il ajouté, l’OSCE doit «intensifier ses efforts» et la crise doit être résolue par tous ensemble. «Si l’UE et l’OTAN pensent détenir la vérité, alors l’OSCE peut fermer», a-t-il conclu.
«Rhétorique guerrière»
Dès 8h05, Didier Burkhalter a accueilli un par un les ambassadeurs ou chefs de délégation des 57 pays membres de l’OSCE, ainsi que plusieurs hauts responsables de l’organisation, de l’OTAN et des Nations unies. La traditionnelle photo de famille a suivi, égayée par la présence au premier plan des quelque 50 représentants du «modèle jeunesse de l’OSCE», qui ont joué le jeu d’une «mini OSCE» cette année.
Le président de la Confédération a ensuite ouvert officiellement la séance plénière en évoquant d’emblée le conflit en Ukraine. «Il y a deux ans et demi, Donetsk recevait cinq matchs de l’Euro 2012 de football. Des fans de toute l’Europe y sont venus voir les Cristiano Ronaldo, Xabi Alonso et Wayne Rooney jouer dans la Donbass Arena».
Aujourd’hui, Donestk est contrôlée par «des groupes armés illégaux», le stade est endommagé par des bombardements et l’aéroport est en ruine, a poursuivi Didier Burkhalter.
Globalement, la situation sécuritaire en Europe s’est détériorée de façon marquante, estime-t-il. Les principes de l’acte d’Helsinki, fondateurs de l’OSCE, ont été violés de façon répétée, le cas le plus flagrant étant l’annexion de la Crimée. Et de déplorer une «activité militaire dangereuse» et l’apparition inquiétante d’une «rhétorique guerrière».
Rencontres bilatérales
La journée de jeudi était très largement consacrée à la crise ukrainienne. Alors que les orateurs se succédaient devant l’assemblée, les rencontres bilatérales se succédaient à un rythme effréné. Au petit matin déjà, avant même l’accueil des ministres au centre des congrès de la Foire de Bâle, Didier Burkhalter s’est entretenu avec Federica Mogherini.
En cours de matinée, John Kerry et Sergueï Lavrov se sont vus en tête à tête sans qu’aucune information ne filtre.
Dans l’après-midi, aucune percée n’était en vue. L’Allemand Frank-Walter Steinmeier a souligné que «le fil des discussions n’était pas rompu», mais qu’il fallait continuer de se battre. Même les négociations sur les textes proposés à l’approbation du Conseil sont «difficiles», selon lui.
Accord sur le terrain
Seule surprise de la journée, la présidence ukrainienne et les séparatistes ont annoncé l’arrêt total des tirs dans l’Est rebelle à partir du 9 décembre, une nouvelle tentative de mettre fin aux combats meurtriers dans cette zone.
Les autorités des deux républiques autoproclamées ont confirmé les informations sur l’arrêt de tirs. Ils ont aussi évoqué le rôle de médiation de l’OSCE pour cet accord «oral». Rien n’aurait en effet encore été signé.
Didier Burkhalter prudent
En début de soirée, Didier Burkhalter est venu résumer la longue journée devant la presse. Il s’est réjoui du large appui qu’il a trouvé sur la mise en œuvre effective de l’accord de Minsk qui devrait commencer à stabiliser la situation.
Il est toutefois resté prudent sur les dernières nouvelles de cessez-le-feu. Et il n’a pas commenté le discours du président russe Vladimir Poutine, n’ayant «pas eu le temps de l’écouter».
(ats/Newsnet)