La traque des frères Kouachi vers son dénouement?

 

Vers le dénouement? Les frères Kouachi recherchés pour l’attentat contre Charlie Hebdo étaient retranchés vendredi, armés, dans les locaux d’une petite entreprise du nord-est de Paris où ils retiennent une personne en otage, selon des sources policières. Le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, a confirmé qu’une «opération» était en cours impliquant le GIGN, pour «neutraliser les auteurs» de l’attentat survenu mercredi contre l’hebdomadaire satirique, le plus meurtrier en France depuis un demi-siècle.

Trois hélicoptères étaient en survol stationnaire au-dessus du site de l’intervention, dans la zone industrielle de Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne). Quelques minutes plus tôt, un échange nourri de coups de feu avait eu lieu avec des policiers qui avaient repéré, à un barrage, une Peugeot 206 volée à une femme à quelques kilomètres au nord, à Montagny-Sainte-Félicité (Oise). Cette femme dit avoir reconnu les frères Kouachi, lourdement armés, selon des sources policières.

Dammartin-en-Goële se situe à environ une demi-heure de route du périmètre où se concentraient, depuis jeudi, les recherches des forces d’élite, à quelque 80 km au nord-est de Paris, à cheval entre l’Aisne et l’Oise. C’est dans cette zone que les deux fugitifs, Chérif et Saïd Kouachi, 32 et 34 ans, avaient été formellement reconnus jeudi matin par le gérant d’une station-essence qu’ils avaient agressé. Visage découvert, ils étaient armés de kalachnikov et disposaient d’un lance-roquette dans leur voiture, selon la vidéosurveillance.

Lien avec Montrouge?

Un autre tireur est aussi recherché par la police: celui d’une fusillade dans laquelle une policière municipale a été tuée jeudi matin en banlieue parisienne – une attaque sans lien «à ce stade» avec l’attentat contre «Charlie», a tenu à préciser jeudi Bernard Cazeneuve. Le suspect a été identifié, et deux personnes ont été interpellées dans son entourage, selon des sources proches du dossier.

Le ministre de l’Intérieur a indiqué vendredi, toujours au sujet de cette fusillade, que «des éléments importants (avaient été) récupérés par les services de la préfecture de police de Paris».

Frères connus

Les frères Kouachi, nés à Paris de parents algériens, sont des djihadistes dont le nom est inscrit «depuis des années» sur la liste noire américaine du terrorisme, selon une source américaine.

Chérif est bien connu des services antiterroristes français: surnommé Abou Issen, il a fait partie de la «filière des Buttes-Chaumont» qui visait à envoyer des djihadistes en Irak, où lui-même entendait se rendre en 2005 avant d’être interpellé. Il a été condamné pour ces faits en 2008 à trois ans de prison, dont 18 mois avec sursis. L’enquête a brossé à cette époque le portrait d’un jeune animé, selon des témoignages, de la «rage contre les mécréants» et qui évoquait déjà sa volonté d’agir en France.

Son aîné, Saïd, «formellement reconnu» par les autorités comme un «agresseur» de l’attentat de mercredi matin à Charlie Hebdo, semblait plus discret. Mais selon un responsable américain, il s’est rendu au Yémen en 2011 pour s’entraîner au maniement des armes – une formation dispensée par un membre d’Al-Qaïda au Yémen.

Au total, neuf personnes ont été placées en garde à vue dans l’enquête sur l’attentat. La tuerie dans les locaux de l’hebdomadaire satirique, régulièrement menacé depuis 2006 et la publication de caricatures de Mahomet, n’a pas été revendiquée. Mais ses auteurs, qui ont crié «Allah akbar» et «on a vengé le prophète» lors de l’attaque, ont été salués commes des «héros» par le groupe djihadiste, Etat islamique actif en Syrie et en Irak.

Vraie menace

Les groupes djihadistes sont considérés comme une vraie menace par les autorités occidentales. «Un groupe de terroristes d’Al-Qaïda en Syrie projette des attentats de grande ampleur contre l’Occident», a prévenu jeudi le chef du service de renseignement intérieur britannique (MI5) Andrew Parker.

Forte émotion

Une très forte émotion a saisi la France après l’attaque dans laquelle ont notamment été tués certains des caricaturistes français les plus connus, comme Wolinski ou Cabu, père du «Beauf» et du «grand Duduche».

Mais aussi Charb, Tignous et Honoré, des historiques de «Charlie» connus pour leurs dessins irrévérencieux, le chroniqueur économique Bernard Maris, deux policiers, une chroniqueuse, un correcteur, un invité de la rédaction et un agent de maintenance.

Au lendemain de la journée de deuil national, marquée par un slogan — «Je suis Charlie» – et une minute de silence qui a figé le pays jeudi midi, «les imams de toutes les mosquées de France» ont été invités par les grandes fédérations musulmanes à condamner «avec la plus grande fermeté la violence et le terrorisme» lors de la grande prière du vendredi.

Marche dimanche

Dimanche, ce sera le tour de «marches républicaines» à l’appel des principaux «partis républicains» de tous bords, de syndicats, d’associations et des grandes fédérations musulmanes. Mais «l’unité nationale» annoncée s’est fissurée, Marine Le Pen dénonçant «l’exclusion» du Front national, contre laquelle s’est également élevée l’UMP.

L’hommage a dépassé les frontières. A Washington, le président américain Barack Obama s’est ainsi rendu jeudi soir à l’ambassade de France pour écrire «Vive la France!» dans le livre de condoléances.

Les survivants de la rédaction de «Charlie» ont décidé de sortir mercredi un nouveau numéro tiré à un million d’exemplaires. «Ce n’est pas la connerie qui va gagner», a lancé l’urgentiste Patrick Pelloux, chroniqueur de l’hebdomadaire.

(cht/afp/Newsnet)