Catastrophe naturelle: Cinq ans après le séisme, Haïti honore les victimes

 

Cinq ans après la catastrophe, qui a fait 300’000 morts et détruit la capitale Port-au-Prince, le gouvernement haïtien a décrété la journée du 12 janvier «journée de réflexion et de commémoration», et le drapeau national sera mis en berne en signe de deuil ce lundi 12 janvier.

«Je ne pouvais pas croire»

Dès dimanche, les Haïtiens se sont rendus en nombre dans les églises, les temples et les loges. «Nous devons penser aux victimes et tirer les leçons de cette catastrophe», a lancé un pasteur dans une église comble.

«Ce 12 janvier, je vais rester à la maison, je vais prier à la mémoire des disparus», témoigne Mirlie St-Preux, 24 ans, qui se souvient du choc du séisme qui l’avait surprise dans les rues. «Après les secousses, je ne pouvais pas croire qu’il y avait tant de victimes et de destructions», se souvient-elle.

«Rien n’a changé»

«Rien n’a changé», déplore l’étudiante en diplomatie. «La reconstruction se résume à quelques bâtiments publics. Il faut plus d’aide». «La vie n’a pas beaucoup changé. La classe moyenne s’est appauvrie. Les familles sont traumatisées et désorganisées. De nouveaux bidonvilles ont été érigés», renchérit Jean Verdy, un militant politique.

Ce n’est pas l’avis de Mary Barton-Dock, envoyée spéciale de la Banque mondiale en Haïti. Elle estime que «les progrès sont visibles (…) Malgré les remous politiques actuels, Haïti a réussi à réduire l’extrême pauvreté de 31% à 24% entre 2000 et 2012».

79’397 personnes déplacées

Des Haïtiens se réjouissent de voir moins de tentes dans la capitale même s’ils souhaitent voir plus de projets de reconstruction. «Des efforts ont été faits pour reloger les sans-abris», reconnaît Mireille, serveuse dans un restaurant de Port-au-Prince.

Depuis le séisme, qui avait fait 1,5 million de sans-abris, «79’397 personnes déplacées (…) vivent toujours dans 105 sites et camps en Haïti» mais le nombre de ménages déplacés a diminué de 94% et le nombre de camps de 93%, fait valoir dans un rapport l’Organisation internationale pour la migration (OIM).

A Canaan, un quartier érigé à la sortie nord de la capitale juste après le séisme, près de 300’000 personnes vivent dans des conditions difficiles, parfois sans eau courante et sans électricité.

Pas de supervision de l’Etat

«Nous sommes ici dans un grand camp, pas dans un village car il manque de tout», explique Jean Vincent, 76 ans, qui vit dans une cahute en plastique. Malgré les services fournis par des ONG de moins en moins visibles, les résidents des camps regrettent l’absence de l’Etat haïtien.

Le 12 janvier 2010, une autre étudiante Fabiola a vu des maisons s’effondrer sous ses yeux. «Aujourd’hui, les constructions poussent sans supervision de l’Etat. Si nous sommes frappés par une catastrophe, il pourrait y avoir beaucoup de victimes», craint-elle.

«Il y a des résultats tangibles, mais plus d’efforts sont nécessaires pour réduire la pauvreté et promouvoir une croissance inclusive et durable. Haïti reste le pays avec la plus grande inégalité des revenus dans la région Amérique Latine et Caraïbes. La faible gouvernance continue à entraver les progrès dans la prestation des services essentiels, tel que l’électricité», admet la représentante de la Banque mondiale.

Grave crise politique

Les efforts de reconstruction sont d’autant plus difficiles à mener que le pays est plongé dans une grave crise politique. Mais à quelques heures des commémorations, le président haïtien Michel Martelly et une vingtaine de dirigeants politiques ont réussi à signer dimanche soir un accord prévoyant la tenue d’élections avant la fin 2015.

L’ambassade des Etats-Unis en Haïti avait exhorté dimanche les acteurs politiques du pays à trouver une issue à l’impasse politique avant mardi. «Comme l’aide internationale commence à baisser après avoir été exceptionnellement élevée en réponse à la catastrophe, les indicateurs sociaux pourraient se renverser si les efforts ne sont pas soutenus et si la croissance n’augmente pas», estime la Banque mondiale.

(afp/Newsnet)