La mobilisation dans la rue pour soutenir Charlie Hebdo a été phénoménale. A présent ce sont les dons, abonnements, mesures de soutien et ventes de produits dérivés, qui arrivent de partout à un rythme effréné.
C’est même la folie. Commençons par Amazon.fr: sur lesdix livres les plus vendus par la librairie géante, huit sont signés par Charlie Hebdo ou ses dessinateurs. Dans le top ten, seules Soumission (de Michel Houellebecq) et Le Suicide français, le brûlot d’Eric Zemmour, n’émanent pas des caricaturistes.
Les abonnements explosent…
Deux jours après les attentats,la principale plateforme de vente de magazines dans l’Hexagone, ViaPresse, comptabilisait déjà plus de 16’000 abonnements à Charlie Hebdo (le journal en recensait auparavant 10’000). En moyenne, 300 abonnements par an pour ce titre sont enregistrés sur ViaPresse. Même l’ancien gouverneur de Californie Arnold Schwarzenegger dit sur Twitter s’être abonné.
Les ventes au numéro sont prometteuses. Le tirage de mercredi a été porté à trois millions d’exemplaires. Son distributeur enregistre des commandes émanant des organismes les plus divers: des maires souhaitant les offrir à leurs administrés, des entreprises pour leurs salariés, des théâtres pour les spectateurs, des distributeurs en Inde, en Australie…
Des points de presse de villages qui ne vendaient que deuxCharlie Hebdo en réclament plusieurs centaines pour mercredi. Les appels affluent de partout. Votre serviteur a même reçu un message des Pays-Bas, pour mettre un exemplaire de côté. A l’export, où Charlie Hebdo ne vendait que 4000 exemplaires, les Messageries Lyonnaises de Presse (MLP) prévoient d’en expédier 300’000. Dont 5000 en Suisse romande, contre 700 d’habitude. «Cela ne suffira sûrement pas à répondre à la demande», estime Alain Meynier, directeur de Naville Presse.
…les soutiens aussi
Les mesures de soutien affluent également. Les recettes du premier million d’exemplaires seront intégralement versées au journal, les MLP ayant accepté de travailler gratuitement. L’imprimeur de Charlie Hebdo tirera à titre gracieux le premier million d’exemplaires. Quant au réseau Médiakiosk, il propose d’offrir une campagne d’affichage au journal martyr. Pour ceux qui n’ont pas suivi l’actualité.
Google s’est engagé à débloquer 250’000 euros dès le lendemain des attentats. La ministre française de la culture, Fleur Pellerin, a annoncé que l’Etat débloquerait 1 million d’euros pour la survie du journal. Le Guardian Media Group donne 100’000 livres. Les particuliers se montrent tout aussi généreux. La plateforme de collecteLeetchi a déjà réuni quelque 145’000 euros via sa cagnotte «Soutenez Charlie Hebdo». Sur le site de Charlie Hebdo, le visiteur est invité à faire un don, par chèque ou par carte bancaire, ponctuel ou mensuel. L’organisation Reporter Sans Frontières consacre aussi un site aux dons à Charlie Hebdo.
Dans un communiqué, le portail eBay annonce qu’«en France, nous reverserons intégralement à Charlie Hebdo, les éventuelles commissions perçues sur les ventes de produits Charlie Hebdo et “Je suis Charlie” listés sur notre site.» Ces sommes pourraient être importantes: le dernier exemplaire du journal (le n°1177), épuisé, a fait l’objet de nombreuses offres sur eBay, où il était proposé à 650, 1000 voire dans un cas 50’000 euros.
Cette effervescence est inédite. En novembre dernier, l’hebdomadaire lançait un appel car il était au bord du gouffre. Les ventes ne couvraient plus le coût de fabrication du journal depuis plusieurs années. «Sa viabilité est menacée», s’inquiétait son équipe dans un communiqué. Le tirage est passé de 55’000 exemplaires en 2009 à 30’000 fin 2014. Pour survivre, les prix ont grimpé, à 3 euros le numéro, et la rédaction envisageait d’ouvrir l’actionnariat du titre voire à intégrer de la publicité. Sur les 700 exemplaires distribués par semaine en Suisse romande, en moyenne seule une petite moitié s’écoulait.
(24 heures)
