France: Jazz, dessins et larmes pour saluer Tignous et Wolinski

 

Des notes de jazz, des dessins et beaucoup d’émotion ont accompagné les derniers hommages rendus ce jeudi 15 janvier par des centaines de personnalités et d’anonymes à Wolinski et à son camarade Tignous, deux dessinateurs emblématiques de Charlie Hebdo.

A la mi-journée, quelque 200 personnes se sont rassemblées sous une pluie fine au crématorium du cimetière parisien du Père-Lachaise pour saluer Georges Wolinski, dessinateur de presse mythique pour toute une génération, tué le 7 janvier dans l’attentat contre Charlie Hebdo.

La ministre de la Culture Fleur Pellerin, le directeur du Théâtre du Rond-Point Jean-Michel Ribes, l’ex-patron de Charlie Hebdo Philippe Val, l’ancienne collaboratrice deCharlie Hebdo Caroline Fourest ou encore le journaliste Ivan Levaï étaient notamment présents.

Un simple bouquet d’anémones avait été posé sur le cercueil de bois clair, introduit sous la coupole du crématorium au son du jazzman Miles Davis.

L’un des derniers dessins de Wolinski, représentant un couple faisant l’amour, la femme tenant la main d’un autre homme flottant vers le ciel et se dirigeant vers Saint-Pierre, était exposé sur un chevalet.

Sur des notes de John Coltrane

Des amis du dessinateur et le président de la Bibliothèque nationale de France (BNF) Bruno Racine ont pris la parole et la foule a défilé aux notes de John Coltrane pour déposer des pétales de roses sur le cercueil.

«Tu es un pur produit de l’intégration», a lancé la gorge nouée un des amis d’enfance de Georges Wolinski, né à Tunis d’une mère d’origine franco-italienne et d’un père d’origine polonaise.

«Dites-leur combien il était bon et tendre», a-t-il ajouté en s’adressant à l’assemblée.

«Je suis un proche de cœur et d’esprit de toute l’équipe qui est partie. Je suis venu leur dire que l’esprit qu’ils ont amené à Charlie Hebdo restera», a souligné Claude Gilbert, 73 ans, l’un des nombreux anonymes venus rendre hommage à Wolinski, pilier de la bande de Hara-Kiri dans les années 60 puis de Charlie Hebdo.

Inhumé au cimetière du Montparnasse

Son inhumation aura lieu dans l’après-midi au cimetière du Montparnasse à Paris.

Au même moment, la cérémonie d’obsèques de Tignous, 57 ans, auteur de BD caustique et engagé, s’est tenue à Montreuil (Seine-Saint-Denis), autour du cercueil recouvert de dessins d’amis et de mots de soutien.

Plusieurs centaines de personnes assistaient à cette cérémonie à l’Hôtel de ville et ont applaudi son cercueil à la sortie, avant l’inhumation prévue dans l’après-midi au cimetière parisien du Père-Lachaise.

Parmi elles, la ministre de la Justice Christiane Taubira a déclaré que l’on pouvait «tout dessiner, y compris un prophète» en France, évoquant «le droit de se moquer de toutes les religions».

Devant la mairie, proches et anonymes ont partagé leur peine.

Un homme extrêmement gentil

«Je l’ai connu à ses débuts. C’était un bon cuisinier et déjà un homme extrêmement gentil», a déclaré le dessinateur Gondot, ami de Tignous. «On continuera sa quête de vérité contre la bêtise avec les copains de Charlie, comme lui avec noblesse et rigolade».

«Je suis là pour refuser la logique de la haine et de la terreur, saluer sa mémoire et revendiquer la liberté d’expression», a ajouté, en sanglots, Martine, retraitée et lectrice de Charlie Hebdo.

A Montgiscard (Haute-Garonne), les funérailles de l’économiste Bernard Maris se sont quant à elles déroulées devant 300 personnes, dont les écrivains Michel Houellebecq et Emmanuel Carrère et le président de Radio France, Mathieu Gallet.

«Je me souviens de sa grande gueule d’acteur américain, son sourire plein de dents et son léger accent toulousain. Avec lui, on était tout de suite bien», a déclaré Emmanuel Carrère.

La psychiatre Elsa Cayat inhumée également

L’inhumation de la psychiatre Elsa Cayat, chroniqueuse àCharlie Hebdo, a eu lieu jeudi à la mi-journée au carré juif du cimetière du Montparnasse, en présence notamment de l’ancien Premier ministre Jean-Marc Ayrault, des anciens ministres de l’Economie Arnaud Montebourg et de la Culture Aurélie Filippetti, de la maire de Paris Anne Hidalgo et de membres de Charlie Hebdo, dont le dessinateur Luz.

Plusieurs centaines de personnes, dont le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve, ont assisté jeudi à Bernay (Eure) aux obsèques de Franck Brinsolaro, le policier de 49 ans tué dans la salle de rédaction de Charlie Hebdo, alors qu’il assurait la protection du dessinateur Charb.

Parmi les nombreuses personnes présentes, plusieurs portaient un badge: «Je suis Francky.»

(afp/Newsnet)