Washinton-La Havane: Le marché des télécoms, vrai enjeu à Cuba?

 

Après l’annonce, historique, à la mi-décembre sur la normalisation des relations diplomatiques entre Washington et La Havane, voici venu le moment de passer aux choses concrètes. Mardi, Américains et Cubains se retrouveront, pour la première fois, à la table des négociations pour discuter des questions migratoires.

En attendant, aux Etats-Unis, un autre pan des négociations, et sur lequel Barack Obama a beaucoup insisté lors de l’annonce historique de décembre, échauffe les esprits: les acteurs américains du marché des télécommunications s’interrogent quant à la perspective, vendue par l’administration Obama, de faire à moyen terme des affaires dans l’île.

«Nos sanctions ont empêché les Cubains d’avoir accès aux technologies qui ont permis aux individus du monde entier de gagner en autonomie», affirmait le président américain le 17 décembre, en annonçant la levée des restrictions de commerce sur ce secteur.

Selon la feuille de route de la Maison-Blanche, le renforcement des libertés à Cuba passera par des exportations de matériel et de services américains vers l’île. «Les fournisseurs de télécommunications seront autorisés à créer à Cuba les mécanismes, y compris les infrastructures, pour offrir des services Internet et de télécommunication», écrivent en guise de vœu les services de l’administration Obama.

Perspectives alléchantes
Sur le papier, les perspectives sont alléchantes: dans l’île de 11 millions d’habitants, le taux de pénétration d’Internet, service maintenu à un tarif très cher pour le Cubain moyen, n’est que de 5%, «l’un des plus faibles au monde», note la Maison-Blanche, et celui de la téléphonie mobile à 18%, selon un rapport de l’ONU.

Cités par le site Channel Partners, observatoire du marché des télécommunications, des acteurs américains de ce secteur imaginent donc des perspectives d’affaires, au vu de l’obligation, tôt ou tard pour le gouvernement cubain, de moderniser ses infrastructures s’il entend se reconnecter au monde et dynamiser son économie. «Cuba est un terrain vierge et tout est à construire», affirme Scott Belcher, directeur de l’industrie des télécommunications, qui représente Cisco, Intel, Microsoft ou encore Verizon.

Tout le monde n’est pas aussi enthousiaste. Si l’île est l’un des derniers pays au monde à avoir un monopole d’Etat sur les télécoms, ce n’est pas à cause de l’embargo américain, mais par la volonté de La Havane de garder le contrôle sur la population, considérant Internet comme une menace pour sa sécurité nationale, analyse toujours pour le compte de Channel Partners Sebastián Arcos, exilé cubain et directeur de l’Institut de recherches cubaines, à Miami. Or selon lui, cette ligne ne changera pas de sitôt. «Si le gouvernement cubain avait voulu moderniser ses télécommunications, cela ferait longtemps qu’il se serait adressé à un autre pays, comme le Japon, la France ou l’Espagne.»

(24 heures)