Cuba et USA réunis pour des pourparlers historiques

 

De hauts responsables cubains et américains ont engagé mercredi à La Havane un dialogue pour la première fois depuis 35 ans. Il s’agit de fixer les bases du rapprochement historique annoncé mi-décembre entre les deux pas par Barack Obama et Raul Castro.

A la mi-journée, la sous-secrétaire d’Etat pour l’hémisphère occidental, Roberta Jacobson est arrivée, marquant la première visite d’un responsable américain de ce niveau dans l’île depuis 1980. La première phase des discussions est consacrée mercredi à la révision des accords migratoires entre ces pays distants de moins de 200 km.

Les débats à huis clos sont menés par le sous-secrétaire d’Etat pour les Amériques Alex Lee, et côté cubain par la directrice des États-Unis au ministère des Affaires étrangères, Josefina Vidal.

Les délégations ont salué un dialogue «productif» et «constructif» à l’issue d’une première réunion consacrée à l’immigration. Les débats n’ont toutefois pour l’instant débouché sur aucun accord significatif.

Réouverture des ambassades?

Jeudi, ils seront centrés sur le rétablissement des relations diplomatiques rompues en 1961. La réouverture d’ambassades est le volet le plus attendu.

«A Cuba, nous mettons un terme à une politique qui a dépassé sa date d’expiration. Quand ce que vous faites ne marche pas pendant 50 ans, il est temps d’essayer quelque chose de nouveau», a rappelé mardi soir le président américain Barack Obama dans son discours sur l’état de l’Union.

Avant Mme Jacobson, le dernier responsable américain d’un tel niveau à visiter l’île communiste était le secrétaire d’Etat adjoint Peter Tarnoff, sous l’administration Jimmy Carter. En 1980, il avait effectué trois voyages à Cuba, s’entretenant avec Fidel Castro pour tenter de désamorcer plusieurs points de tension.

Visas d’immigration

Sur le volet migratoire, en vertu d’accords signés en 1994, Washington s’engage à limiter les octrois de visas d’immigration et à renvoyer vers Cuba les migrants illégaux interceptés en mer. De son côté, La Havane est censée admettre les expulsés et lutter contre l’immigration illégale.

Les experts anticipent un allègement des restrictions migratoires des deux côtés, mais selon un membre de la délégation américaine dépêchée à Cuba, il ne faut pas s’attendre à une annonce spectaculaire. «Nous ne devons pas demander que tout soit résolu en une seule réunion», a confirmé un responsable de la chancellerie cubaine au quotidien officiel «Granma».

En toile de fond de ces débats migratoires plane l’ombre de la «loi d’ajustement», adoptée en 1966 par les Américains et qui offre des avantages d’installation aux émigrés cubains. Un texte vivement contesté par La Havane qui le voit comme un encouragement à tenter la périlleuse traversée du détroit de Floride.

Officiellement, seul le Congrès est habilité à abroger cette loi, mais plusieurs experts assurent que la Maison Blanche a la possibilité de la vider de sa substance, nourrissant les craintes de nombreux Cubains.

«Tendre une main amicale»

Dans le cadre du rapprochement, le président Obama a déjà indiqué qu’il soumettrait bientôt aux parlementaires la levée de l’embargo commercial et financier imposé à l’île communiste depuis 1962, même si la majorité républicaine au Congrès a annoncé son opposition au projet. Mardi soir, il a appelé à «tendre une main amicale au peuple cubain».

Dans le même effort de réconciliation, il s’est engagé à étudier le retrait de Cuba de la liste américaine des pays soutenant le terrorisme, qui coupe Cuba de l’assistance des institutions financières internationales. La semaine dernière, Washington a aussi levé une série de restrictions commerciales et de voyages, et a assoupli les transferts de fonds de migrants cubains.

La Havane a de son côté libéré 53 prisonniers politiques figurant sur une liste remise par les États-Unis. Même si une large majorité d’Américains salue le changement de politique envers Cuba, plusieurs élus républicains et une partie de la dissidence cubaine critiquent Washington pour n’avoir rien obtenu en échange.

(afp/Newsnet)