La BBC préfère ne pas utiliser le mot terroriste pour parler des frères Kouachi et d’Amedy Coulibaly

 

Dans la presse française, les auteurs des attentats contre Charlie Hebdo et Hyper Cacher ont été partout qualifiés de «terroristes». Mais dans les articles et émissions de la BBC sur les événements, les frères Kouachi et Amedy Coulibaly sont décrits comme des «tireurs»(gunmen) et des «assaillants» (attackers), pas des «terroristes».

Ce choix éditorial a été confirmé et expliqué dimanche par Tarik Kafala, le directeur du service de la BBC en arabe, interviewé par le quotidien The Independent:

«Nous essayons d’éviter de dire qu’un individu est un terroriste ou de dire qu’un acte est terroriste. On essaye plutôt de dire quelque chose comme “deux hommes ont tué douze personnes dans l’attaque d’un journal satirique”. C’est suffisant.»

«Terrorisme est un mot tendancieux. Cela fait plus de dix ans que l’ONU essaye de définir ce mot, et ils n’y arrivent pas. C’est très difficile. Nous parlons de violence politique, de meurtre, de bombardement, de fusillade. Nous pensons que c’est beaucoup plus informatif que d’utiliser un mot comme terroriste, que les gens ne considèrent pas comme neutre.»

The Independent rappelle que ces déclarations correspondent aux règles éditoriales de la BBC (pas seulement de la BBC en arabe), disponibles en ligne:

«Nos règles n’interdisent pas l’utilisation de ce mot. Cependant, nous demandons aux membres de la BBC de bien réfléchir avant de l’utiliser. Il est possible de faire part de l’horreur et de l’impact humain de ces actes de terreur sans utiliser le mot terroriste pour en décrire les responsables.»

Pendant les attentats de Bombay qui avaient fait 173 morts en 2008, la BBC avait déjà été critiquée pour sa décision de ne pas employer le mot terroriste afin de décrire les auteurs des attaques. Un porte-parole de la chaîne avait alors répondu:

«Ça n’a rien à voir avec le politiquement correct. Nous ne disons pas qu’il s’agit de combattants de la liberté. Nous utilisons des termes comme poseur de bombe ou militant. Le mot terroriste n’a pas un sens universel.»

 L’agence de presse britannique Reuters a une position similaire à celle de la BBC: les journalistes de l’agence ont évité l’utilisation du mot terroriste pour désigner les auteurs des attentats contre Charlie Hebdo et Hyper Cacher. Un article du 8 janvier décrivait les frères Kouachi comme des «tireurs islamistes» (islamist gunmen).

De même, Reuters n’avait pas utilisé le mot «terroriste» pour décrire les auteurs des attentats du 11 septembre 2001, et la direction de l’agence avait alors expliqué que le terme terroriste est trop «chargé émotionnellement» et trop proche du «jugement de valeur».

slate.fr/