Crise en Ukraine: Course contre la montre diplomatique pour Merkel

 

La chancelière allemande Angela Merkel poursuit samedi à Munich sa course contre la montre pour tenter de faire avancer les négociations en vue d’un accord de paix en Ukraine, après des discussions cruciales vendredi au Kremlin.

La chancelière allemande Angela Merkel a déclaré samedi que la livraison d’armes occidentales à l’armée ukrainienne n’aiderait pas à régler le conflit qui oppose Kiev aux séparatistes prorusses dans l’est du pays.

«Je suis intimement convaincue que ce conflit ne peut être réglé militairement (..) Les progrès dont l’Ukraine a besoin ne peuvent être atteints avec plus d’armes», a-t-elle dit à la Conférence sur la sécurité de Munich (sud de l’Allemagne).

Tout juste revenue de Moscou où, accompagnée du président français François Hollande, elle a négocié jusque tard dans la nuit avec le maître du Kremlin pour tenter de remettre sur les rails une solution diplomatique, elle va retrouver plusieurs protagonistes de la crise à la Conférence sur la sécurité de Munich.

Porochenko et Joe Biden

Elle devait notamment rencontrer lors d’une trilatérale à la mi-journée le président ukrainien Petro Porochenko et le vice-président américain Joe Biden après une intervention à 10H30 (09H30 GMT) à la conférence.

Mme Merkel devrait présenter à ses interlocuteurs les résultats de cinq heures d’intenses négociations vendredi soir avec M. Poutine qui ont permis d’avancer vers la rédaction d’un document visant à mettre fin à dix mois de guerre en Ukraine.

Séparatistes

Confronté à une situation militaire et économique désastreuse, M. Porochenko est sous pression face aux revendications des séparatistes, qui réclament plus d’autonomie et la prise en compte de leurs nouveaux gains territoriaux dans les négociations.

Mme Merkel devrait rappeler à M. Biden son opposition à la livraison d’armes aux forces loyalistes pour tenter de rééquilibrer le rapport de forces sur le terrain. Une telle option, à l’étude à Washington, ne ferait que «mettre de l’huile sur le feu et nous éloigner de la solution souhaitée», a rappelé vendredi sa ministre de la Défense, Ursula von der Leyen, à Munich.

John Kerry et Lavrov

Un entretien est également prévu entre les chefs de la diplomatie américaine John Kerry et russe Sergueï Lavrov, Moscou ayant d’ores et déjà mis en garde contre toute livraison d’armes à Kiev.

Aucune information n’a filtré sur la teneur du projet d’accord évoqué à Moscou, rendant difficile toute appréciation sur le succès de la rencontre et la viabilité d’un éventuel plan de paix ainsi que sa capacité à régler le conflit qui s’est déjà soldé par la mort de plus de 5’300 personnes, majoritairement des civils.

Porochenko confiant

Alors qu’on lui demandait s’il était confiant sur la suite du processus de paix, M. Porochenko a répondu «oui» aux journalistes en arrivant samedi matin à la conférence de Munich.

Un «bilan préliminaire» des discussions pour l’élaboration du document «sera fait dimanche au cours d’un entretien téléphonique dans le format dit de Normandie» entre les quatre dirigeants russe, français, allemand et ukrainien, a annoncé le Kremlin, en référence à une précédente rencontre des quatre dirigeants en marge des commémorations des 70 ans du débarquement allié.

Ce document doit permettre la mise en oeuvre des accords de Minsk de septembre 2014, le seul accord de paix jusque-là signé par tous les belligérants et qui prévoit notamment un cessez-le-feu.

Cessez-le-feu à dessiner

Vladimir Poutine, qui soutient les rebelles prorusses dans l’est de l’Ukaine, et le président Petro Porochenko doivent encore se mettre d’accord sur les conditions de ce cessez-le-feu, souligne samedi le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung, citant des sources proches des négociations.

«Même si les contours d’un cessez-le-feu se dessinent, les discussions (de Moscou) ne sont qu’une préparation pour une prochaine rencontre entre Poutine et Porochenko», relève le quotidien.

La nouvelle proposition de règlement du conflit doit garantir «l’intégrité territoriale de l’Ukraine», a par ailleurs assuré le chef de l’Etat français en annonçant jeudi l’initiative de paix franco-allemande.

Cette initiative, soutenue par Washington, l’Union européenne et l’Otan, a tout de la médiation de la dernière chance après 10 mois d’un conflit qui a également provoqué une crise dans les relations Est-Ouest digne de la Guerre froide.

«Les prochains jours vont être rudes pour Merkel (..) Ce week-end sera crucial pour la crise en Ukraine et les relations avec la Russie», prédit samedi l’hebdomaire allemand Der Spiegel sur son site internet, alors que la chancelière est attendue lundi à Washington pour des discussions avec le président américain Barack Obama.

Poutine puni

Si Angela Merkel «échoue (…) alors les Etats-Unis voudront punir Poutine», prédit le journal.

Alors que le ballet diplomatique autour de l’Ukraine se déplaçait à Munich, les bombardements se sont poursuivis sur le terrain dans l’est de l’Ukraine, tuant au moins un civil dans la nuit, ont indiqué les séparatistes.

Dans la ville de Debaltseve, tenue par l’armée ukrainienne et presque encerclée par les rebelles prorusses, la poursuite de la trêve observés vendredi pour permettre l’évacuation de civils pris au piège des bombardements était incertaine.

(afp)