Procès Bettencourt: Woerth nie avoir reçu des espèces

 

Eric Woerth a assuré que la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, dont il était trésorier en 2007, avait été gérée «de manière rigoureuse». Mais l’ex-comptable de Lliliane Bettencourt a réitéré ses accusations.

«Je n’ai pas reçu d’argent liquide» de Patrice de Maistre, ancien financier personnel de Mme Bettencourt, a martelé l’ex-ministre de Nicolas Sarkozy devant le tribunal de Bordeaux où dix prévenus ont à répondre d’éventuels abus de faiblesse dont aurait été victime l’héritière de l’Oréal.

Il a reconnu avoir eu deux rendez-vous avec le gestionnaire de fortune de Liliane Bettencourt début 2007, mais a nié avoir touché 50’000 euros et une somme «indéterminée», entre 100’000 et 400’000 euros. «Jamais (M. de Maistre) ne m’a remis d’espèces pour financer une campagne ou quoi que ce soit d’autre», a-t-il lancé.

Intervenant en visio-conférence en raison de son état de santé, Claire Thibout, l’ex-comptable de Liliane Bettencourt, principale témoin à charge, a réitéré mardi ses accusations. Elle a affirmé que Patrice de Maistre lui avait demandé le 11 janvier 2007 de retirer 150’000 euros d’un compte bancaire.

De l’argent de Suisse?

«Je lui ai demandé pourquoi. Il m’a répondu : je dois voir M. Woerth, c’est pour la campagne électorale de M. Sarkozy», a-t-elle déclaré.

Le 17 janvier, elle procédait à un retrait de 50’000 euros en liquide, le maximum possible sur un compte accréditif, puis a remis le lendemain une enveloppe contenant la somme à Liliane Bettencourt, laquelle l’a confiée à Patrice de Maistre.

Plus tard, Patrice de Maistre, selon Claire Thibout, va lui dire que «ça sert d’avoir des comptes en Suisse». «J’en ai déduit qu’il avait récupéré le reste de l’argent (100’000 euros) en Suisse», a-t-elle conclu.

Les deux hommes se sont ensuite rencontrés le 19 janvier, ce qui a convaincu les juges que cette réunion dans un café parisien avait permis de remettre l’argent à Eric Woerth, ce que les deux hommes ont toujours nié.

«Chronologie étonnante»

Le président du tribunal Denis Roucou a pointé du doigt «une chronologie étonnante, une proximité de dates» entre les sorties de liquidités et les remises d’argent. «A partir de ces rapprochements de dates, Mme Thibout a construit quelque chose pour me nuire», s’est défendu M. de Maistre, rétorquant que «c’est une pure invention depuis le début».

Eric Woerth a pour sa part expliqué que ses rendez-vous avec M. de Maistre, «membre du premier cercle de donateurs de l’UMP», visait notamment à discuter de donateurs potentiels et de son réseau. Il a reconnu que la preuve de son innocence est «totalement impossible» à fournir.

Mais lors de cette campagne, «nous avons été chercher des dizaines de milliers de chèques» de financement licite, «ce n’était pas pour courir dans je ne sais quel café recevoir je ne sais quel argent» occulte.

Paiements jusqu’en 2009

L’instruction a retenu que le 30 janvier suivant, Patrice de Maistre avait rencontré à Genève Me René Merkt, chargé des nombreux comptes suisses de Liliane Bettencourt, pour mettre en place un système de mise à disposition d’espèces. Les remises d’argent venu des comptes suisses se sont poursuivies jusqu’en décembre 2009, dont une le 26 avril 2007 d’un montant de 400’000 euros.

Eric Woerth, 59 ans, est poursuivi pour le «recel» dans ce volet de l’affaire. L’ancien ministre et actuel député UMP encourt une peine de cinq ans d’emprisonnement et 375’000 euros d’amende. Quant à M. Sarkozy, mis en examen en 2013 dans ce dossier, il a depuis bénéficié d’un non-lieu.

Dans un autre volet de la tentaculaire affaire Bettencourt, pour «trafic d’influence» cette fois, MM. de Maistre et Woerth seront jugés du 23 au 25 mars à Bordeaux. Le premier est soupçonné d’avoir reçu la Légion d’honneur en échange d’un poste accordé à l’épouse de M. Woerth.

(ats)