Etats-Unis: Rien ne va plus entre Obama et Netanyahou

 

Furieuse de ce discours organisé dans son dos entre le premier ministre israélien et le leader républicain de la Chambre des représentants, la présidence américaine a exclu toute rencontre à la Maison-Blanche. Et le vice-président Joe Biden qui assiste traditionnellement aux discours de dirigeants étrangers, sera absent en raison d’un déplacement à l’étranger opportunément organisé au même moment.

La tension est palpable et la Maison-Blanche ne prend plus vraiment de gants pour exprimer son exaspération. Cette visite a un effet «destructeur», a lancé, dans un registre inhabituel, Susan Rice, proche conseillère du président américain.

Cette polémique éclate au moment où se dessinent les contours d’un possible accord sur le programme nucléaire iranien, qui empoisonne les relations internationales depuis une décennie.

 Nucléaire iranien

Pour le président américain Barack Obama, un accord avec Téhéran visant à s’assurer que la république islamique n’obtient pas l’arme nucléaire figurerait en très bonne place, dans le chapitre «politique étrangère» de son bilan.

M. Netanyahou, qui a déclaré qu’il ferait «tout» pour empêcher la conclusion d’un accord qu’il juge dangereux, a érigé ce dossier en priorité absolue. «Je respecte la Maison-Blanche et le président américain, mais sur un sujet si grave, c’est mon devoir de tout faire pour la sécurité d’Israël».

Si l’on ajoute les élections israéliennes dans deux semaines et le nouvel équilibre politique américain – un Congrès entièrement dominé par les républicains pour la première fois depuis l’arrivée au pouvoir de M. Obama – tous les ingrédients sont réunis pour un pic de tension.

«C’est la tempête parfaite qui éclate enfin sur fond d’une relation (entre les deux hommes) qui fonctionne mal», résume Aaron David Miller, du centre de réflexion Woodrow Wilson.

Visions du monde différentes

«C’est un clash de personnalité, de politiques, et un clash sur la façon dont ces deux dirigeants voient le monde», ajoute cet ancien diplomate américain qui fut impliqué, avec plusieurs administrations successives, dans les négociations au Proche-Orient.

Depuis l’annonce de cette visite peu conforme au protocole, la Maison-Blanche distille des piques à l’attention du gouvernement israélien. Elle a ainsi ouvertement déploré qu’Israël diffuse des informations qu’elle juge parcellaires sur les négociations en cours pour déformer la position américaine.

«Nous serons toujours en première ligne dans notre engagement derrière l’Etat d’Israël, mais (M. Netanyahou) fait peut-être tout simplement une erreur de jugement» sur le dossier nucléaire iranien, a lancé mercredi le secrétaire d’Etat John Kerry devant une commission de la Chambre des représentants.

Pour Aaron David Miller, l’exécutif américain «utilise ce faux-pas de M. Netanyahou (le discours devant le Congrès, Ndlr) pour essayer d’envoyer un signal clair» à l’approche des élections dans son pays. «Ils ne peuvent bien sûr pas le dire, mais soyons clairs: ils aimeraient le voir quitter le pouvoir», estime-t-il.

Divisions dans la classe politique américaine

Point d’interrogation qui illustre l’état d’esprit qui domine à Washington à l’approche de cette visite, la Maison-Blanche n’a pas encore indiqué si elle serait représentée à la conférence annuelle de l’AIPAC, principal lobby pro-Israël aux Etats-Unis, qui se réunit à partir de dimanche. M. Obama y avait prononcé un discours en 2012.

La visite du premier ministre israélien suscite aussi des divisions au sein de la classe politique américaine. Des sénateurs démocrates ont proposé à ce dernier de le rencontrer, mais il a décliné l’invitation.

«Le soutien de l’Amérique pour Israël a historiquement, et c’est une bonne chose, toujours transcendé les partis», indiquaient dans leur courrier les influents sénateurs Richard Durbin et Dianne Feinstein. Or l’invitation adressée à M. Netanyahou sans aucune consultation préalable menace d’affaiblir cette approche, ajoutaient-ils, faisant part de leur «profonde inquiétude».

(ats)