Israël: Netanyahu, un premier ministre qui divise

 

«Tout le monde sauf Bibi», le surnom de M. Netanyahu, est devenu le cri de ralliement officieux de ses adversaires. Ce n’est pas pour déplaire à celui dont le slogan pourrait être: «C’est moi ou les autres».

Inspirés par les méthodes américaines, des milliers de jeunes volontaires ont battu le pavé de Tel-Aviv, frappé aux portes, fait chauffer les téléphones pour le compte d’une organisation citoyenne (V15) financée par de grandes fortunes juives pour mobiliser les électeurs de gauche et les hésitants de droite contre M. Netanyahu.

Deux cents ex-généraux, héros de générations d’Israéliens, ont constitué une sorte de lobby anti-Netanyahu parce qu’il serait dangereux pour la sécurité d’Israël. Ces campagnes ont fait dire à l’intéressé, rarement rebuté par l’hyperbole, que sa victoire n’était pas assurée «parce que, dans le monde entier, on essaie avec force de renverser le Likoud», son parti de droite nationaliste.

Stature internationale

Plus jeune premier ministre d’Israël de 1996 à 1999, à nouveau en poste depuis 2009, M. Netanyahu, 65 ans, atteindra les dix années de pouvoir s’il continue à gouverner. Seul l’historique David Ben Gourion, fondateur de l’Etat d’Israël, sera resté plus longtemps.

Ce bonhomme costaud au visage lisse et à l’impeccable mèche blanche est une figure si dominante du quart de siècle que le quotidien «Haaretz» a essayé «d’imaginer la vie sans Netanyahu».

«Quand Israël aura perdu Bibi, il y aura sûrement des moments où il regrettera de ne plus avoir un leader de stature internationale, reconnu par tout le monde et qui – qu’on l’aime ou pas – fait que le reste du monde relève la tête et prête attention quand il prend la parole sur l’Iran ou un autre sujet», écrit-il.

Quelques images rendent compte du personnage, professionnel des médias, prêt à jouer des coudes et aller «partout où on m’invitera (…) pour défendre l’avenir et l’existence» d’Israël.

Un appel au «retour» qui scandalise

Parmi elles, M. Netanyahu à la tribune du Congrès américain le 3 mars, défiant la réprobation du président Barack Obama, pour dire tout le mal qu’il pense de l’accord en négociation sur le nucléaire iranien.

Ou celle, le 11 janvier, de M. Netanyahu au premier rang des dirigeants du monde marchant contre le terrorisme à Paris. M. Netanyahu se sent le «représentant du peuple juif dans son entier». Ses appels aux juifs à rejoindre leur «foyer» en Israël ont outré Français et Européens.

Pas question pour M. Netanyahu de céder sur la revendication de voir Israël reconnu comme «l’Etat nation du peuple juif», n’en déplaise aux Palestiniens. 2014 a vu l’échec de la énième tentative de paix israélo-palestinienne et une nouvelle guerre à Gaza.

Sous M. Netanyahu, la colonisation s’est poursuivie sans relâche. Pour beaucoup, il n’a jamais vraiment accepté la création d’un futur Etat palestinien.

Le nouvel ennemi mortel

Petit-fils de rabbin, fils d’un historien ultra-sioniste, ancien combattant des forces spéciales blessé au combat, M. Netanyahu ne cesse de pourfendre le «terrorisme international» et «l’extrémisme islamiste». Mais le nouvel «Amalek» pour lui, l’ennemi mortel des Hébreux dans la Bible, c’est l’Iran.

Avec le discours de M. Netanyahu au Congrès, les relations de MM. Netanyahu et Obama sont rarement tombées aussi bas. M. Netanyahu a passé une grande partie de sa jeunesse aux Etats-Unis, son anglais est parfait, mais les photos des regards lourds de MM. Obama et Netanyahu dans le Bureau ovale en disent long.

Sous la direction de ce libéral sans états d’âme, l’économie est en relative bonne santé. Mais beaucoup n’arrivent pas à joindre les deux bouts, les inégalités sont criantes.

M. Netanyahu «transpire la peur en permanence. Nous n’avons jamais eu un premier ministre qui terrifie autant le pays», dit son adversaire travailliste Isaac Herzog. La dissolution de sa coalition était un pari. Les élections diront s’il l’a gagné ou perdu.

(ats)