Attentat en Tunisie: «Ils se sont mis à tirer, sans pitié»

 

«Ils se sont mis à tirer sur les touristes. Ils tiraient sur tous ceux qu’ils rencontraient, sans pitié, sans pitié», raconte Josep Lluis Cusido vendredi à sa descente à Barcelone du paquebot MSC Splendida de retour de Tunis, où sont morts 12 des passagers. Maire du village de Vallmoll, en Catalogne (nord de l’Espagne), il fait partie des centaines de personnes secouées et tendues après deux jours d’angoisse qui ont ainsi débarqué de ce navire ayant fait escale mercredi dans la capitale tunisienne, où des dizaines de passagers se sont retrouvés sous le feu de jihadistes.

L’attaque du musée national du Bardo, célèbre pour ses mosaïques, a fait 21 morts, en majorité des touristes. Victoria Bronskaïa, 33 ans, une guide touristique bélarusse établie à Barcelone depuis 13 ans, avait terminé la visite du musée et attendait dans le car. «Ils ont tué deux hommes de notre groupe qui tentaient de monter dans le car et qui sont tombés sur les marches. C’est pour ça que le terroriste n’a pas pu monter», a-t-elle dit à l’AFP. «Nous avons attendu quatre heures qu’on vienne nous sauver».

Angoisse

«Nous ne nous sommes mis à pleurer que quand nous avons vu les gens de Tunis s’apitoyer sur nous, disant ‘pardonnez nous’. C’est une sensation inoubliable que les gens de la rue, des gens humbles, te parlent comme ça». Les nerfs à fleur de peau, Francisco Buciegas et son épouse Inma ont fini par rejoindre Barcelone après une lune de miel écourtée et tombent dans les bras d’une amie en descendant de la navette. «Nous étions plongés dans l’angoisse», déclare Inma en essayant de retenir ses larmes. «Et je ne veux plus rien savoir des pays arabes», lance son mari, semblant oublier que d’autres attentats ont récemment eu lieu en Europe.

Ce couple de Cordoue avait commencé sa croisière il y une semaine. Tout se passait bien jusqu’à mercredi, quand ils ont précipitamment été ramenés au bateau sans savoir ce qui se passait au musée du Bardo. Ce n’est que des heures plus tard qu’ils l’ont appris. «Nous nous sommes jetés sur le téléphone pour dire à nos familles que nous étions indemnes», raconte Francisco.

Coup dur pour le tourisme

Jeunes mariés, avec Inma enceinte de quatre mois, le couple avait le même profil que deux autres Espagnols qui n’ont été retrouvés que jeudi, le lendemain de l’attaque, après avoir passé la nuit dans un placard du musée. Le paquebot a accosté à Barcelone à 07H00 (06H00 GMT) vendredi, avec à son bord 3174 passagers et les 1267 membres de l’équipage.

Pour 700 d’entre eux c’était la fin du voyage, les autres devaient visiter Barcelone et poursuivre leur croisière en Méditerranée. «C’était très triste hier soir. Personne ne dansait plus», a déclaré Piot Henri, un professeur réunionnais de 50 ans. «Mais je n’avais pas peur et n’ai toujours pas peur. Je retournerai dans les pays arabes».

«C’est vrai que ça peut arriver n’importe où, mais en ce moment je resterai à l’écart des pays arabes», a déclaré Iwe Poerschke, un Allemand de 61 ans, originaire de Francfort comme son épouse. «Ca va être un coup dur pour le tourisme en Tunisie. Et ça va toucher des gens qui n’y sont pour rien, c’est malheureux», ajoute-t-il. Le couple, comme beaucoup d’autres passagers, se plaint du manque d’informations de la part de l’équipage. «Il ne nous a rien dit, je l’ai appris par la télévision», affirme Iwe.

«Je comprends leur malaise mais nous n’avons pas un équipage de 1200 psychologues, ce sont 1200 êtres humains», a déclaré le directeur des croisières MSC pour l’Espagne, Emiliano Gonzalez, dans une conférence de presse au cours de laquelle il a confirmé que sa compagnie suspendait les escales à Tunis. Un couple de retraités espagnols est mort dans l’attaque. Antoni Cirera et Dolors Sánchez fêtaient leurs 50 ans de mariage avec cette croisière que leur avaient offert leurs enfants, a raconté Josefa Ramírez qui dînait avec eux à bord tous les soirs mais est restée sur le navire mercredi. «J’étais très réticente à l’idée d’aller en Tunisie. Maintenant, je n’ai aucune envie d’y retourner, ni là-bas, ni dans aucun pays arabe», dit-elle.

(afp)