Diplomatie: Obama et Castro enterrent les vestiges de la guerre froide

 

Cette rencontre entre les deux présidents marque l’avènement d’une nouvelle ère dans les relations entre les deux ennemis de la guerre froide. A l’occasion du Sommet des Amériques et en marge de cet entretien qui fera date, les deux hommes ont multiplié les marques d’ouverture. Sans omettre de souligner leurs nombreux points de désaccord hérités de plus d’un demi-siècle de tensions et d’affrontements. Face à M. Castro, le président Obama a remercié son homologue cubain pour son «esprit d’ouverture» et estimé qu’«avec le temps, il est possible pour nous de tourner la page et développer une nouvelle relation (…) même si nous avons des différences profondes et importantes», dans un bref point-presse conjoint avant leur entrevue.

Patience nécessaire

Cette rencontre consacre le réchauffement surprise annoncé mi-décembre entre les deux pays, après un demi-siècle de relations agitées depuis la révolution de Fidel Castro en 1959. «Nous voulons parler de tout, mais nous devons être patients, très patients», a répondu Raul Castro, qui a succédé à son frère Fidel en 2006. «Cela a été une histoire compliquée, celle de nos pays, mais nous sommes disposés à avancer comme le dit M. Obama», a-t-il poursuivi. Après la rencontre, le président américain a fait état de déclarations «franches et fructueuses». «Nous avons des visions très différentes sur la manière dont la société devrait être organisée. Et j’ai été très direct avec lui», a-t-il expliqué.

«Tournant»

Un peu plus tôt, au moment des discours, les deux chefs d’Etat avaient célébré le retour de Cuba dans le concert continental après des décennies d’isolement. Devant une trentaine de ses pairs, Barack Obama a affirmé que le rapprochement entre Washington et La Havane marquait «un tournant» pour les Amériques. Après un long plaidoyer contre les ingérences des anciennes administrations américaines dans les affaires cubaines et latino-américaines, le dirigeant cubain a voulu saluer la probité du président des Etats-Unis, le qualifiant d’«homme honnête». Il a aussi exprimé sa volonté d’avancer dans un «dialogue respectueux» aspirant à une «coexistence civilisée» en dépit des différences.

Ambassades

Au menu de leurs discussions figurait, selon la Maison-Blanche, la reprise des relations diplomatiques rompues en 1961. Raul Castro a incité son homologue à accélérer les démarches pour le retrait de Cuba de la liste des pays soutenant le terrorisme, dossier qui constitue pour La Havane l’obstacle principal à la réouverture d’ambassades. M. Obama a indiqué qu’il avait reçu une recommandation en ce sens du Département d’Etat, mais qu’il n’avait pas encore eu le temps de l’étudier avant de la transmettre au Congrès. Au-delà des relations diplomatiques, le chemin de la normalisation reste semé de nombreux points de contentieux. Le premier est l’embargo total sur les transactions économiques et financières avec Cuba imposé depuis 1962. Le président cubain a à nouveau insisté sur la nécessité de «résoudre» cette question qui pénalise son pays.

Encore du travail

«Cette rencontre était incroyablement importante. Elle a tout le potentiel pour faire bouger des lignes fondamentales pour l’amélioration des relations entre les deux hémisphères», a commenté Joy Olson du groupe de réflexion Bureau de Washington sur l’Amérique latine (WOLA). Les experts jugent toutefois que beaucoup reste à faire pour reconquérir une place privilégiée dans l’ancien pré carré américain.

La question du Venezuela

Le sommet s’est terminé sans déclaration finale, les Etats-Unis refusant d’y voir mentionner un soutien à Caracas dans sa dispute avec Washington. Les Etats-Unis avaient qualifié le Venezuela, principal partenaire économique de Cuba, de «menace» pour leur sécurité intérieure. Ciblé par les critiques, M. Obama a eu «une brève conversation» avec le président vénézuélien Nicolas Maduro. A cette occasion, a révélé la Maison Blanche, M. Obama a indiqué que son but «n’était pas de menacer le Venezuela, mais de soutenir la démocratie, la stabilité et la prospérité au Venezuela et dans la région». Il avait plus tôt reconnu que le Venezuela ne représentait pas de véritable menace.

Panama (ats/afp) (TDG)