
Le médiateur de l’ONU au Yémen a démissionné alors qu’aucune perspective de paix ne se dessine après trois semaines d’une guerre que l’Arabie saoudite est déterminée à gagner sans appel contre les rebelles soutenus par l’Iran. Le CICR a renouvelé son appel à une trêve humanitaire.
Le diplomate Jamal Benomar a présenté sa démission à l’ONU après avoir tenté en vain ces derniers mois de trouver une solution au conflit entre les Houthis et le pouvoir yéménite incarné par le président Abd Rabbo Mansour Hadi. Le Marocain, âgé de 58 ans, occupait son poste depuis août 2012.
Pour l’analyste Abdelwahad Badrakhan, basé à Londres, M. Benomar a «échoué dans sa mission», notamment depuis l’entrée des Houthis dans la capitale Sanaa le 21 septembre. «Il n’a pas su évaluer les objectifs des Houthis, ce qui a plongé le pays dans une guerre civile et conduit à une intervention régionale», estime l’expert.
L’ONU a simplement annoncé que M. Benomar avait «manifesté son souhait de changer d’affectation» et qu’«un successeur sera nommé en temps voulu». L’un des noms évoqués est celui de l’actuel chef de la mission de l’ONU pour la lutte contre Ebola, le Mauritanien Ismaïl Ould Cheikh Ahmed.
Dupé par les Houthis
Le Conseil de sécurité avait pourtant renouvelé mardi sa confiance à M. Benomar. En parallèle, il avait adopté une résolution sommant les Houthis de quitter le pouvoir et leur imposant un embargo sur les armes.
Selon des diplomates, M. Benomar était vivement critiqué par les partisans de M. Hadi et leurs alliés du Golfe, notamment l’Arabie saoudite. Ces pays lui reprochent d’avoir été dupé par les Houthis qui se sont engagés dans des pourparlers tout en poursuivant leur offensive militaire.
Les Houthis «ont voulu redessiner la carte politique du Yémen. En un sens, ils ont été encouragés par Benomar et nous étions contre», avait confié un diplomate du Golfe peu après le début de la campagne aérienne au Yémen fin mars.
Les rebelles ont pris le pouvoir à Sanaa avant d’étendre leur influence dans plusieurs régions du pays et d’entreprendre une conquête du sud. Ils ont forcé le président Hadi à fuir le mois suivant vers l’Arabie saoudite.
Pas de demi-mesures
Les pays du Golfe ont lancé il y a trois semaines une opération militaire marquée par de nombreux raids aériens contre les positions des rebelles. L’Arabie saoudite, chef de file de la coalition anti-Houthis, a assuré n’avoir aucune intention de relâcher la pression militaire.
«Cette opération continuera jusqu’à ce que les objectifs soient atteints. Il ne peut y avoir de demi-mesures», a affirmé mercredi soir l’ambassadeur saoudien à Washington, Adel Al-Joubeir. Il a toutefois précisé que la coalition «faisait attention à viser des cibles militaires et à minimiser les dommages civils».
Appel à une trêve
Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a toutefois renouvelé jeudi son appel à une trêve humanitaire de 24 heures afin d’avoir accès aux victimes dans tout le pays. «La situation humanitaire empire d’heure en heure», a averti le chef de la délégation Cedric Schweizer.
Selon l’ONU, plus de 730 personnes ont été tuées et plus de 2000 blessées, dont une majorité de civils, depuis le début de l’escalade du conflit. Human Rights Watch a affirmé jeudi que 31 civils avaient péri dans un raid de la coalition le 31 mars près de Hodeida (ouest), alors que jusqu’ici certaines sources attribuaient l’attaque à des Houthis.
Parallèlement aux efforts menés par l’ONU, l’Organisation de coopération islamique (OCI) a demandé jeudi à l’Indonésie de faciliter l’ouverture de négociations sur le conflit au Yémen lors du sommet Asie-Afrique qui se tiendra la semaine prochaine.
(ats)