Dr Alioune Sarr, président du Cng de lutte : « En lutte traditionnelle avec ou sans frappe, les choses ont beaucoup évolué ».

 

C’est avec un sentiment de satisfaction que le président du Comité national de gestion de la lutte (Cng) a assisté à la 18è édition du Drapeau du chef de l’Etat disputé le weekend dernier à Tambacounda. Dr Alioune Sarr est d’avis que le niveau technique des athlètes qui évoluent en lutte simple a beaucoup augmenté. Sous un autre rapport, il a ajouté que l’objectif est de faire de la lutte africaine, une lutte olympique.

Niveau technique des lutteurs
« J’étais content quand j’ai vu certaines régions se singulariser par leurs belles prestations. Sauf qu’on m’a dit que les lutteurs qui défendaient leurs couleurs n’étaient pas originaires desdites régions. J’étais un peu déçu parce que ces athlètes n’habitent pas dans ces régions. Or l’esprit du Drapeau du chef de l’Etat, c’est que les lutteurs portent les couleurs de leurs régions respectives. Il faut qu’on travaille dans ce sens pour mieux relever le niveau dans toutes les régions.
J’ai commencé à regarder la lutte depuis 57 ans. J’ai assisté à mes premiers combats en 1955. J’ai vu lutter Bory Patar, Cheikh Mbaba jusqu’aux lutteurs d’aujourd’hui. En lutte traditionnelle avec ou sans frappe, les choses ont beaucoup évolué parce que la modernité a réintégré le sport avec ses avantages et ses inconvénients. Le niveau technique a bien progressé et ce que j’ai vu à l’édition de cette année le prouve. En général, on avait un lutteur qui dominait une catégorie. Après ce qui s’est passé, ma conclusion est qu’aucun lutteur ne domine aucune catégorie. Vous avez vu un grand champion comme Moustapha Sène qui a fait ses preuves au Sénégal et en Afrique, qui fait partie des rares lutteurs à avoir battu Reug Reug, se faire battre par un illustre inconnu, de la belle manière ».

Le problème de la pérennisation des acquis
« Maintenant, les régions qui organisent vont souvent en finale, ce n’est pas propre à la lutte. Quand on organise, on essaie de mettre toutes les chances de son côté. Kaffrine, Diourbel, Thiès ont tous réussi à aller en finale à domicile. Mais après qu’est-ce qui se passe ? Ces régions ont du mal à pérenniser les acquis.
Quelqu’un a soulevé le problème de la « qualité locale ».
En fait, l’envie de vaincre est telle qu’on n’amène plus des produits locaux ».

Les lutteurs de l’équipe nationale
« Mais est-ce normal d’écarter certains athlètes sous prétexte qu’ils ont duré à l’équipe nationale ? Non. Le Drapeau du chef de l’Etat est le championnat national de lutte simple. Tout athlète est libre d’y participer.

Toujours est-il que cela n’a pas empêché le spectacle d’être à la hauteur. On a vu qu’il y avait beaucoup de talents lors des combats entre Fatick et Dakar. Il faut dire d’ailleurs qu’il n’y a jamais eu autant de talents que pendant cette 18e édition. C’est le fruit de l’expérience. Il faut aussi admettre que la région de Fatick est la meilleure en lutte simple au Sénégal. Il faut qu’on soit d’accord là-dessus. Kaolack aussi a de bons lutteurs ; de même que Thiès, Diourbel. Je voudrais en profiter pour féliciter le président du Comité régional de gestion (Crg) de Thiès pour les actes qu’il est en train de poser pour la promotion de la lutte. Si tout le monde fait comme lui, bientôt la lutte sera développée dans toutes les régions.

Pesée
« Il y a une circulaire qu’on avait sortie concernant la pesée. Moi-même, j’ai fait un point de presse pour dire que nous ne tolérons aucun gramme supplémentaire. Si les lutteurs viennent en surpoids, c’est la faute à leurs encadreurs qui n’ont pas fait le travail qu’il fallait. D’ailleurs, il y avait un lutteur qui a été évacué. Il a tellement diminué son poids qu’il a piqué une crise après son combat. Les responsabilités doivent être situées au niveau des encadreurs des lutteurs. L’athlète doit être maîtrisé. Normalement en un mois, on doit pouvoir régler la question du poids pour un lutteur ; mais cela doit se faire dans les règles de l’art. Sinon l’athlète, une fois sur place, n’aura pas les capacités nécessaires pour combattre. Ensuite, il risque de perdre beaucoup d’énergie. Je lance un appel aux responsables des équipes. Le règlement est fait pour être respecté. L’émotion ne peut aller de pair avec l’encadrement d’un athlète. On ne peut pardonner à ceux qui violent délibérément le règlement. On ne pardonne qu’à ceux qui ignorent le règlement ».

Disqualification de Louga
« Des superviseurs ont été désignés pour aller dans les régions lors de la phase de sélection. Ils ont fait des rapports que nous avons exploités. Dans ce cas bien précis, il avait été dit qu’il n’y avait rien à signaler, les choses s’étaient passées normalement y compris dans la région de Louga. D’où la notion de confiance. Mais force est de constater que lors de la pesée, le Directeur technique national, Abdou Badji, et ses collaborateurs, faisant correctement les choses, ont découvert que les lutteurs de Louga, sauf un, avaient une licence en lutte avec frappe ; alors qu’il faut une licence de lutte sans frappe pour faire de la lutte sans frappe. Quand j’ai été mis au courant de l’affaire, j’ai personnellement appelé le superviseur qui m’a confirmé que les garçons ont lutté avec une licence de lutte sans frappe. J’ai convoqué tout de suite une réunion d’urgence parce que ce qu’il avait dit ne devait pas justifier l’exclusion des quatre lutteurs de Louga. J’ai donc tenu une réunion avec la Direction technique, le président du Crg de Louga ainsi que les techniciens qui ont confirmé que les lutteurs ont fait la phase de sélection avec des licences de lutte avec frappe. Je pense que le superviseur n’a pas fait son travail comme il le fallait. Au niveau du Cng, nous allons prendre nos responsabilités par rapport à ce manquement que nous trouvons extrêmement grave et à la limité irresponsable.

Manque de moyens du Crg de Tamba
« Le comité national prend en charge les dépenses majeures, le transport de région à région, l’hébergement, la nourriture etc.
Le comité local est chargé de la mise en place des infrastructures surtout au stade mais nous ne nous immisçons pas dans l’organisation du comité. Nous avons effectivement constaté des manquements à Tamba et nous étions obligés de nous substituer au comité local. C’est le Cng qui a mis en place les aires de combats, les tribunes et disons, tout ce qui était nécessaire pour une bonne organisation de la compétition. Nous allons faire le bilan et nous espérons que pareils manquements ne se reproduisent pas à Kolda puisque nous irons dans cette région l’année prochaine pour les besoins de la 19e édition du Drapeau du chef de l’Etat. Sur le plan de la communication, nous avons travaillé en étroite collaboration avec la 2Stv. Nous avons aussi fait passer 15 spots publicitaires à la Rts de Tamba. Est-ce à dire que les gens n’écoutent pas les radios ? Est-ce à dire que les gens ne regardent pas la télé ? Est-ce à dire que les gens ne lisent pas la presse ?

Lutte africaine, lutte olympique
A-t-on l’impression que le Sénégal a pris une avance sur les autres pays concernant la lutte et le règlement africains ? Je me méfie toujours de ce que j’appelle l’autosatisfaction. Il y a quelques années, on était en avance dans d’autres disciplines mais cela ne nous a pas empêché de gagner des titres continentaux voire plus. Il faut continuer à travailler.
Notre combat, c’est de faire de la lutte africaine un sport olympique mais cela doit passer par plusieurs étapes. Le football n’est pas africain.

Il faudra qu’on soit assez lucide, assez conscient pour y parvenir. Nous comptons avec nos partenaires de la Confédération africaine de lutte associée, et la Fila, poser les jalons d’une reconnaissance et ensuite progressivement aller vers le sommet.

Recueillis par Diégane Sarr / Lesoleil.sn /