Me Massokhna Kane sur la grève des enseignants «On va ester l’Etat en justice s’il continue de payer les enseignants grévistes»

 

Président de Sos consommateur, Me Massokhna Kane a été, ce samedi, l’invité du Grand Oral. Sur les ondes de la 97.5 Rewmi FM, il est largement revenu sur le procès de Khalifa Sall et Cie, renvoyé au 3 janvier prochain, la nomination de Seydou Nourou Bâ pour une bonne tenue du dialogue politique, la grève des enseignants, etc. Morceaux choisis.

Affaire Khalifa Sall

C’est une malheureuse affaire et je regrette ce qui est arrivé au maire Khalifa Sall. Ce que je dois déplorer, c’est une sorte de justice sélective dans la mesure où il y a beaucoup de responsables qui sont indexés par des contrôles, qui ont des dossiers qui existent. C’est regrettable que ce soit Khalifa Sall qui soit poursuivi jusqu’à présent. Il y a beaucoup d’autres personnes qui devaient être poursuivies. Donc, c’est en bon droit que les hommes politiques disent qu’il y a une justice sélective et qu’il y a des gens qu’on ne veut pas poursuivre. Ce n’est pas normal du tout dans un pays qui se dit démocratique, dans un Etat de droit. C’est en quelque sorte une instrumentalisation de la justice. Cette sélection fait croire qu’il y a des cibles et d’autres qui sont protégés. Il devra rectifier le tir parce que ce n’est pas ce qu’on attendait de lui.

Violation des droits du député-maire

Il y a la rumeur publique, mais il y a aussi la réalité du dossier et des faits. Je ne suis pas dans le dossier et je ne connais pas exactement ce qu’il y a dans le dossier. Donc, je ne peux ni confirmer ni infirmer qu’il y a des violations. En tout cas, ses avocats ont beaucoup dénoncé les violations. La partie adverse s’en défend et maintenant que le tribunal est saisi, je pense que le droit sera dit, et sera bien dit, parce que les magistrats qui ont en charge ce dossier…, notamment le Président Maguette Diop, a fait depuis très longtemps les preuves de son indépendance et de son autorité en matière de justice. On peut avoir une présomption que ce dossier sera bien jugé.

Les Sénégalais ignorent le « droit »

On dit toujours que nul n’est censé ignorer la loi. Ce qui n’est pas exacte parce que généralement, les gens ne connaissent pas les textes. Mais l’essentiel des textes découlent des comportements des personnes. Il faut éviter tout ce qui est comportement répréhensible et c’est ça qui fait qu’on ne tombe pas sous l’aspect pénal de certaines infractions. Je pense qu’il y a des avancées significatives. Par exemple, quand les avocats interviennent dès l’interpellation, il faut que les gens s’habituent à le faire. Il ne faut pas attendre jusqu’à ce qu’on soit déféré au parquet pour constituer un avocat. Il faut chercher un avocat dès qu’on commence à recevoir des convocations de la police.

L’immixtion de l’Exécutif dans certains dossiers pendants devant la justice

Il est normal que l’Exécutif essaye de s’immiscer dans le judiciaire parce qu’il y a un lien ombilical entre l’Exécutif et le Judiciaire : c’est le Ministère de la Justice. Le Ministère de la Justice est l’autorité politique qui s’exerce sur les magistrats, notamment le parquet. Toute la chaîne du parquet est sous l’autorité de ce ministère. Par conséquent, c’est la politique qui s’exerce dans le Judiciaire. Il est normal qu’il y ait cette immixtion-là. Ce qui ne serait pas normal, c’est que cette même autorité politique tente de s’immiscer dans les tribunaux, au niveau des magistrats du siège. Généralement, les magistrats sont très réfractaires.

Dialogue politique avec la nomination de Seydou Nourou Bâ

Je salue cette nomination et je félicite Seydou Noura Bâ que je connais personnellement. C’est un diplomate au sens le plus élevé du terme. C’est un homme de consensus, paisible et courtois, qui a des positions en toute chose. Il est membre de Sos consommateur comme adhérent simple. Je lui souhaite beaucoup de courage. Le dialogue politique est indispensable dans un Etat. Je suis persuadé qu’il peut beaucoup aider dans ce dialogue. Qu’on se dise que c’est un proche de Macky Sall, ça m’étonne. Je ne pense pas qu’il soit membre de l’Apr, mais il peut avoir peut-être des relations avec le Président. C’est prématuré d’avoir des préjugés de ce genre sur lui. Je ne vois pas dans ce pays un homme qui rassemble plus de capacités et de compétences pour diriger ce dialogue. Et pour le dialogue, tant qu’il y a des préalables, on ne va pas s’asseoir autour d’une table pour discuter. Il faut permettre que les gens s’assoient autour d’une table sans des conditions au préalable. Quand les Sénégalais s’assoient, j’en suis sûr qu’ils vont se retrouver.

Perturbation dans le système éducatif

Dans ce cadre, Sos consommateur analyse et réagit. On fait des communiqués et des déclarations. D’ailleurs, on prépare un communiqué sur la grève des enseignants. Nous allons mener un plaidoyer sur l’exercice de ces grèves, aussi bien dans le personnel de l’enseignement que le personnel de la santé. Les syndicats de l’enseignement ont repris leur sport favori. C’est-à-dire les grèves, débrayages, etc., non précédé d’un préavis légal. Je pèse mes mots. Autant de forme de grèves qui sont préjudiciables, non pas à l’Etat du Sénégal, mais aux élèves et aux étudiants qui n’ont commis aucune faute. Quelle que soit la légitimité de leurs revendications, ces grèves illégales doivent être sanctionnées. Il faut que l’Etat fasse preuve d’autorité. L’Etat est trop faible devant ces grèves-là. Quelqu’un qui décide de ne pas travailler, il ne faut pas le payer. Si l’Etat décide de payer des grévistes qui n’ont pas travaillé, nous avons décidé de poursuivre l’Etat du Sénégal. Parce que c’est un détournement de deniers publics. On n’a pas le droit d’utiliser des deniers publics pour des gens qui n’ont pas travaillé alors que le service doit être payé une fois exécuté. Même après préavis parce que ça c’est financer la grève. Quelles que soient les raisons de la grève, que ce soit dans le privé ou dans le public, nous avons demandé à être impliqués dans les discussions. Et depuis un mois, nous attendons la réponse du ministre.

Cheikh Moussa SARR

rewmi.com