[CHRONIQUE] Un “refuge” chez Macron ?

 

Calculs politiciens, hasard du calendrier ou simple coïncidence ? La visite du chef de l’État sénégalais Macky Sall en France, du 17 au 21 avril prochain, jette la suspicion sur le pouvoir et sa volonté d’abandonner ses administrés à des moments où le peuple retient son souffle.

Devant la détermination de l’opposition sénégalaise à vouloir empêcher le vote du projet de loi instaurant le parrainage à la présidentielle de 2019, ce n’est pas faire preuve de responsabilité que d’abandonner les Sénégalais à leur propre sort. Car, quitter le pays dans ces circonstances de troubles imminents peut s’apparenter à une fuite de responsabilité. Or, un chef de l’État doit assumer, s’assumer et avoir le courage de ses idées, quelles qu’elles soient.

“Le Président de la République, Son Excellence Monsieur Macky Sall, a quitté Dakar ce mardi  17 avril à destination de Paris. Le séjour du Chef de l’État sera marqué par des entretiens avec le Président Macron sur des sujets d’intérêt commun. Son retour est prévu ce 21 avril 2017″, renseigne un communiqué de la présidence de la République diffusé dans les médias. Mais on peut se demander quelle est cette urgence si pressante à rencontrer Emmanuel Macron, de surcroît à des heures aussi décisives où se joue l’avenir du pays. Alors que des sujets prioritaires voire urgentes et d'”intérêt national” font planer sur le pays tout entier, des menaces d’un 23 juin bis, donc de troubles réels à l’ordre public.

Au cas où la visite aurait été calée d’avance, le bons sens recommanderait que le président de la République y sursoie. Par décence, par respect au peuple qui redoute des troubles préélectoraux qui pourraient découler de cette radicalisation de la classe politique sénégalaise, opposition et pouvoir confondus.

Lorsqu’on est porteur et défenseur d’une réforme aussi controversée, on n’a pas le droit de se débiner, mais de rester avec le peuple, aux côtés du peuple, s’expliquer, faire des concessions, reculer si nécessaire ou être prêt en dernier ressort à assumer toutes les conséquences qui découleraient de cette volonté unilatérale de faire passer en force une loi qui ne sert que les intérêts du pouvoir.

Prendre les airs dans ces circonstances peut donner l’impression d’être devant un chef de l’État qui prend la débandade pour ne pas être témoin de l’histoire, pour ne pas être témoin de faits qui, comme en 2011, se sont soldés par une quasi-reprise du pouvoir par le peuple souverain, d’où la sagesse d’Abdoulaye Wade à reconnaître ses erreurs, à battre en retraite à temps, ce qui a pu éviter au Sénégal des drames nés d’un pouvoir dans la rue.

L’histoire va-t-elle se répéter ? Le 23 juin 2011, le pouvoir d’Abdoulaye Wade en proie à une révolte populaire sans précédent, avait fini par céder en décidant d’abandonner le projet de ticket présidentiel que s’apprêtaient à voter les députés de son camp, alors majoritaires à l’Assemblée nationale. Sept ans après, le Sénégal et les Sénégalais n’en attendent pas moins de son successeur Macky Sall.

seneweb