CORONAVIRUS : “LE PROBLÈME, C’EST L’IRRESPONSABILITÉ DE L’EUROPE ET DES USA”

 

Le débat fait rage entre chercheurs et autres scientifiques. Depuis quelques jours, les prétendues découvertes de remèdes miracles se succèdent, entrecoupées de pronostics tantôt positifs, tantôt négatif. Entre les Belges et le chercheur canadien Michel Chrétien qui annoncent avoir trouvé le remède tant recherché et l’épidémiologiste Marc Lipsitch, de l’université américaine de Harvard, qui estime que le Covid 19 fera des ravages d’ici un an, au point de toucher jusqu’à 70% de l’humanité, l’on ne sait plus à quelle… science se vouer.

Mais, face à cette multitudes de thèses annoncées à gauche et à droite, il y a lieu, pour le Professeur chercheur sénégalais Daouda Ndiaye, chef du département de parasitologie de l’ Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD), il y a lieu de présenter l’Occident face à ses responsabilités. L’universitaire accuse les Etats Unis et l’Europe leur politique de gestion de la crise, pour avoir tenté, au début de la propagation du coronavirus, d’isoler la Chine en faisant rapatrier leurs compatriotes.

« Ils n’ont qu’à trouver les moyens de ne pas contaminer l’Afrique. Ils ont voulu faire du show en rapatriant les Européens de la Chine sans aucune raison scientifique sinon géopolitique. Ils devaient savoir qu’ils s’exposaient en faisant ces rapatriements. Où étaient ces chercheurs Européens pour dire non à ces rapatriements car tout le monde scientifique s’attendait à cette situation en Italie provenant de leur rapatriement », s’est plaint Pr Daouda Ndiaye, via sa page Facebook. Joint ensuite par Emedia.sn pour plus de détail, il a enfoncé le clou :

« Imaginez qu’on vient de confirmer un cas en Algérie, avec un touriste qui vient d’Italie. Le souci, aujourd’hui, c’est que les Européens ne veulent pas tenir un langage de vérité à leurs populations car ils savent que c’est leur décision de rapatriement qui est à l’origine de tout cela et c’est ce qui risque de compromettre l’humanité. Tout le problème repose sur l’irresponsabilité de l’Europe et des Etats Unis. Les Africains que nous sommes devons dire la vérité à ces gens sur ce qui se passe. »

Pour le parasitologue sénégalais, nommé il y a deux ans Conseiller spécial à l’Université américaine de Harvard, les autorités des pays occidentaux font l’erreur de donner une réponse géopolitique à une question d’ordre scientifique. « Seuls les chercheurs Chinois peuvent se prononcer avec crédibilité sur ces questions, se désole-t-il, avant de clamer que les actes posés par l’Europe et les Etats Unis n’ont rien à voir avec la Science : « C’est géopolitique. Tout le monde sait que ça n’a rien à voir à la science. Les scientifiques ont malheureusement été mis de côté dans ces pays. Ils ont voulu isoler la chine, la détruire sur le plan économique. Ils ont voulu profiter d’une situation pour mettre à terre la Chine. Si la situation arrivait en Afrique, jamais ils n’allaient envisager rapatrier leurs compatriotes. Regardez ce qui se passe en Italie, est-ce qu’on a vu les Américains ou les Français demander le rapatriement de leurs compatriotes en Italie ? Non. Pourtant, rien a changé concernant l’épidémie en Chine ou en Italie. « Hier on a voulu isoler les Chinois, ils sont restés dignes en combattant seuls avec dignité et efficacement, aujourd’hui des Européens veulent faire croire que le traitement provient d’eux. »

Et, pour faire face à la situation, telle qu’elle se présente actuellement en Italie, il conseille de… prendre exemple sur la Chine plutôt que de se lancer dans des pronostics alarmants, à l’instar de l’épidémiologiste Marc Lipsitch, de l’université américaine de Harvard. « Attention à ce genre de message car nous devons rester scientifique jusqu’au bout des ongles si on veut efficacement éteindre cette épidémie et ces chaînes européennes et ces gens ne sont pas crédibles sur ces questions. Qu’on soit de Harvard, de Yale ou de l’Ucad, aujourd’hui il n’y a que la Chine qui peut donner de vraies informations. On peut faire des projections sur le plan épidémiologique, mais cela a ses limites. La Chine gère la situation et c’est là où on avait plus de craintes parce que la population y est plus grande. Maintenant, si au bout de quelques semaines on voit une évolution sur les cas en Europe, on pourra juger s’ils ont raison ou tord. »

Quid des scientifiques de tous bords qui estiment avoir trouvé le remède miracle ? Daouda Ndiaye conseille d’y aller avec modération et reste très dubitatif face à la thèse du Docteur canadien Michel Chrétien. « Même le code génétique n’est pas encore connu. Plusieurs souches circulent. Les codes peuvent être similaire mais comment on peut développer un remède pour lequel on n’a pas vu un patient et on n’a pas d’essai clinique ? La Science est têtue et ne se base que sur de la réalité. En dehors des Chinois, personne ne peut vous dire du concret. Aucun essai clinique ne peut se faire avec exactitude présentement pour aboutir à une telle conclusion. »

Pour terminer, notre interlocuteur estime que sa grande crainte serait que l’Afrique ne soit touchée, car n’ayant pas réellement les prédispositions pour faire face à ce qui y serait rapidement une pandémie. « Ce qu’il faut craindre, c’est que l’Afrique soit touchée. Là, on ne peut plus savoir ce qui se passera parce que nous n’avons ni le plateau technique ni le dispositif qu’il faut pour gérer cela. Ici, seul un pays sur trois a juste les capacités de diagnostics et de prise en charge pour un nombre limité de personnes… »

Solution ? « Il faut rester vigilant, ferme, et se baser sur la Science et la Médecine. Maintenant, il faut renforcer la protection des frontières, faire le screening (NDLR : le dépistage, en médecine, consiste à rechercher une ou plusieurs maladies ou anomalies dites « à risques » chez les individus d’une population donnée) de toutes les personnes qui entrent dans le pays car au début, le screening n’était fait que sur ceux qui venaient des zones endémiques, mais désormais, vu ce qui se passe, il faut le faire sur tous, d’où qu’il viennent. Même si tu es Sénégalais venant d’Europe, vu la situation actuelle, on doit te surveiller. Il faut ensuite beaucoup communiquer et rassurer la population sur le fait que la décision prise initialement est la meilleure. »

emedia