Coronavirus: Accord des 27 sur une réponse économique

 

Les ministres européens des Finances sont parvenus jeudi à un accord sur une réponse économique commune face au coronavirus. Ils ont trouvé un terrain d’entente avec les Pays-Bas qui bloquaient les discussions depuis mardi, a-t-on appris de sources concordantes. «La réunion s’est achevée sous les applaudissements des ministres», a annoncé sur Twitter le porte-parole du président de l’Eurogroupe aux alentours de 22h00. Le ministre français des Finances, Bruno Le Maire, a lui salué un «excellent accord», incluant «500 milliards d’euros disponibles immédiatement» et «un fonds de relance à venir».

Ce consensus constitue un soulagement pour les Européens qui parviennent à afficher une unité face aux conséquences économiques désastreuses du virus. Des semaines d’atermoiements ont mis en évidence une fracture béante entre les pays du Nord et ceux du Sud.

«Solidarité européenne»

Face à la pandémie, la réponse européenne doit s’orienter sur trois axes principaux: jusqu’à 240 milliards d’euros de prêts du fonds de secours de la zone euro, un fonds de garantie de 200 milliards d’euros pour les entreprises et jusqu’à 100 milliards pour soutenir le chômage partiel. La brûlante question des «coronabonds», destinés à soutenir l’économie à plus long terme après la crise, considérée comme moins urgente, n’a pas été tranchée jeudi.

Les eurobonds ont toutefois «été mis sur la table, et les conditions du MES ont été retirées de la table», s’est réjoui le ministre italien de l’Économie Roberto Gualtieri. Son pays a appelé à maintes reprises à un emprunt européen sous la forme d’eurobonds, également appelés coronabonds, et refusait toute condition attachée aux prêts du Mécanisme européen de Stabilité (MES).

Le ministre allemand des Finances Olaf Scholz a pour sa part estimé que jeudi était «un grand jour pour la solidarité européenne». Car «nous avons répondu à l’appel de nos citoyens pour une Europe qui protège», a déclaré le président de l’Eurogroupe, le Portugais Mario Centeno, lors d’une conférence de presse.

Les chefs d’État et de gouvernement, qui n’étaient eux-mêmes pas parvenus à s’entendre lors d’un sommet le 26 mars, devront encore valider les propositions des ministres.

Pays-Bas critiqués

Une réponse unitaire était d’autant plus indispensable que l’économie européenne se dirige en 2020 vers une profonde récession. Les contacts bilatéraux s’étaient multipliés depuis deux jours, avec la «volonté d’aboutir à un compromis avant la réunion» par visioconférence, initialement programmée à 17h00, mais qui n’a débuté qu’à 21h30.

Mercredi matin, après seize heures d’échanges stériles, La Haye avait été unanimement critiquée pour son inflexibilité. Les États membres reprochaient aux Pays-Bas -soutenus, selon une source européenne, par l’Autriche, la Suède et le Danemark- de bloquer l’activation du Mécanisme européen de stabilité (MES) en conditionnant strictement les prêts que pourrait octroyer ce fonds de secours de la zone euro à des réformes économiques.

Une telle «conditionnalité», qui renverrait à l’époque où la Grèce a été contrainte de mettre en oeuvre des réformes parfois douloureuses en échange d’argent frais, aurait été vécue comme une humiliation par Rome et Madrid. Ces deux pays européens sont pour l’instant les plus touchés par l’épidémie.

Créé en 2012 lors de la crise de la dette et financé par les États membres, le MES pourrait prêter aux États jusqu’à 2% de leur PIB, soit jusqu’à 240 milliards d’euros pour l’ensemble de la zone euro.

«Fonds de relance»

Les pays les plus affectés par le virus, en particulier l’Italie, réclament la création d’un «fonds» de relance qui puisse être financé par de la dette commune, sous la forme d’euro-obligations parfois appelées «coronabonds» ou «eurobonds». Parmi ces pays figurent aussi l’Espagne et la France, ainsi que la Grèce, Malte, le Luxembourg ou l’Irlande, selon des sources concordantes.

Or, la mutualisation des dettes constitue une ligne rouge pour Berlin et La Haye, qui refusent de s’inscrire dans une démarche commune avec les Etats très endettés du Sud, jugés laxistes dans leur gestion. Le texte final évoque un «fonds de relance» dont «les aspects juridiques et pratiques», notamment le «financement» devra encore être défini.

Les deux autres axes de réponse des Européens face au virus étaient plus consensuels: un fonds de garantie de la Banque européenne d’investissement (BEI) permettant de mobiliser jusqu’à 200 milliards d’euros pour les entreprises et une garantie de 100 milliards d’euros maximum de la Commission européenne pour soutenir les plans nationaux de chômage partiel.

(nxp/ats)