Monsieur Le Président, Monsieur le Gouverneur, Monsieur le sous-préfet : où est passée l’aide alimentaire d’urgence promise aux populations les plus fatiguées ?

 

C’est l’une des questions que se posent  les 2618 ménages de la commune de Makacolibantang à l’instar des autres villages et communes de la région de Tambacounda, alors que pointe la soudure. Annoncée début avril et amorcée à la fin du dit mois dans le contexte de la pandémie du COVID 19, pour soutenir des familles et des ménages en situation de malnutrition déjà quasi permanente, les sacs de riz, bidons d’huile et autres vivres sont pour le moment « comme les pluies : On les attend, elles nous sont promises mais on a encore rien vu » comme le clame avec poésie mais aussi beaucoup de dépit, Mamadou, cultivateur et père de 7 enfants.

Pour les bénéficiaires désignés, le sentiment et le constat amer restent toujours les mêmes : la région de Tamba est toujours aussi éloignée de la capitale et de ses décideurs. « On a une belle autoroute pour faciliter la circulation des hommes et des marchandises, mais à quoi sert-elle si elle n’est pas capable de ravitailler ceux qui souffrent en temps et en heure.  Même une charrette avec des ânes serait déjà arrivée », poursuit Moro, résigné une fois de plus à ne rien voir venir.

Privés de leur marché hebdomadaire -une décision parfaitement comprise par les populations- les habitants de la zone sont d’autant plus fatigués que leurs parents nombreux en Europe ont été terriblement touchés par la pandémie européenne. « Nos parents ont subi un confinement total en Italie », confie El Hadji, dont le frère résidant à Bergame a été au coeur du foyer. Pas de travail, pas d’argent, aucun moyen d’envoyer de l’argent avec la fermeture de tous les établissements bancaires et postaux. Et avec la crise économique qui se profile d’ores et déjà en Europe, une situation déjà très précaire qui ne va pas s’améliorer pour ces milliers de ressortissants. (Plusieurs centaines pour la seule commune de Makacolibantang).

« Il faut bien se rendre compte que si nos communes villageoises et rurales tiennent encore debout depuis plusieurs décennies, c’est davantage grâce au sacrifice de nos maris et papas partis à l’émigration que grâce au soutien de l’Etat », témoigne à son tour Sandji, privée de son mari depuis 7 ans. «  Nous survivons grâce à ces parents, et malgré cela nous ne sommes pas capables d’acheter du poisson ou de la viande et encore moins des fruits ou du lait pour que nos enfants grandissent bien. » « L’Etat a beaucoup communiqué sur cette aide et vraiment à ce moment là, nous étions contents, soulagés et loué Dieu» poursuit Thierno. « Mais force est de reconnaitre que depuis lors, nous n’avons plus aucune information en provenance de ceux qui administrent notre région ». Un silence absolu qui inquiète et nourrit d’autres soupçons, celui du détournement ou de l’affectation des vivres à d’autres populations que celles désignées par l’administration territoriale. Un soupçon légitime quand le silence remplace l’information. «  Qu’on nous dise si l’aide va venir et quand  et comment » protestent de concert des chefs de famille réunis sur la bantaba. Sinon, comment empêcher les populations de penser qu’une fois de plus, certains se seront bien servis et auront bien servi leurs amis au passage.

Pourtant, Le Ministre du Développement communautaire, de l’Equité sociale et territoriale, Mansour Faye, s’était  engagé : «  « L’Armée sénégalaise sera au coeur de l’affaire. Presque en amont et carrément en aval. On travaille sur des schémas de distribution, en relation avec les forces de sécurité et de défense. On a intégré l’Armée et la Gendarmerie dans le dispositif. Ils vont nous accompagner dans le convoyage , la distribution et tout ce qui est sécurisation »

Bruno Briand / www.tambacounda.info /