Les canicules africaines sont très largement ignorées

 

 

Les vagues d’extrême chaleur qui frappent l’Afrique subsaharienne ne font pas l’objet de statistiques exhaustives, selon une étude publiée lundi dans la revue Nature Climate Change. Cette situation rend difficile leur étude et la mise en oeuvre de systèmes d’alerte.

Alors que les épisodes de canicule et leurs conséquences sont systématiquement étudiées dans les zones plus riches au monde, «les conséquences de ces canicules [en Afrique, ndlr] ne sont pas enregistrées», souligne l’auteur principal de l’étude, Luke Harrington, de l’institut du changement de l’environnement à l’université britannique d’Oxford.

Pourtant, «les observations de terrain comme les modélisations climatiques montrent que l’Afrique subsaharienne est particulièrement exposée aux canicules», souligne le chercheur.

Ainsi, seuls deux épisodes caniculaires dans la région figurent, sur les 120 dernières années, dans la principale base de données mondiale sur les catastrophes naturelles, l’Emergency Events Database (EM-DAT). Les données concernant d’autres types d’événements, sécheresses ou inondations par exemple, sont tout aussi lacunaires.

Au-delà du supportable pour l’homme

En revanche, 83 épisodes caniculaires ayant entraîné plus de 140’000 décès et pour douze milliards de dommages sont enregistrés pour le seul continent européen sur les 40 dernières années. «Il est urgent de s’attaquer à cette contradiction,” déclare Luke Harrington.

Selon d’autres études, les épisodes de températures extrêmes, dont certains potentiellement au-delà de limites supportables pour l’être humain, devraient se multiplier dans les prochaines décennies, notamment dans les régions tropicales.

«Le principal problème n’est pas l’absence des données météorologiques, mais de données sur les conséquences [de ces phénomènes, ndlr], comme la mortalité ou des conséquences sur le secteur de l’énergie ou les infrastructures,” souligne Friederike Otto, directrice de l’institut du changement de l’environnement.

«Sans étudier ensemble les données de météorologie et d’impact, on ne sait pas élaborer un système d’alerte précoce», explique la chercheuse.

«Les populations africaines sont très conscientes de l’augmentation des canicules. Mais si elles ne sont pas enregistrées par les scientifiques, les voix africaines porteront plus difficilement dans le débat sur le climat», commente pour sa part côté Mohamed Adow, directeur de l’ONG Power Shift Africa, à propos des résultats de l’étude.

(ATS)