Nucléaire en Polynésie: «Il n’y a pas eu de mensonge d’Etat»

 

 

Entre 1966 et 1996, la France a réalisé 193 essais nucléaires en Polynésie française. En mars, une enquête estimait que la France avait sciemment minimisé l’impact des retombées radioactives de ces essais sur la population des îles. Mais vendredi, la ministre française Geneviève Darrieussecq a assuré qu’il n’y avait pas eu de mensonge d’Etat sur cette affaire.

Plus de 110’000 personnes exposées à la radioactivité

La polémique a débuté en mars 2021, alors que le média d’investigation en ligne «Disclose» a publié une enquête intitulée «Toxique» dans laquelle il affirmait que la France avait sciemment minimisé les chiffres des retombées radioactives des essais nucléaires. Cette enquête assurait que plus de 110’000 personnes avaient été exposées à la radioactivité des suites de ces essais nucléaires, soit la quasi-totalité de la population des archipels à l’époque.

Un «coup de com à dix mois de la présidentielle»

C’est cette étude qui est le déclencheur d’une table ronde ayant lieu jusqu’à vendredi soir à Paris et consacrée aux conséquences de ces essais. Or, la ministre chargée de la Mémoire et des Anciens combattants, Geneviève Darrieussecq, a déclaré vendredi matin: «Il n’y a pas eu de mensonge d’Etat». Cette dernière a ainsi exclu un pardon de la France, préalable nécessaire à toute discussion pour le député indépendantiste polynésien Moetai Brotherson.

Dénonçant «un coup de com à dix mois de la présidentielle», cet élu a refusé de participer à la table ronde, tout comme les principales associations antinucléaires. Son parti, le Tavini Huiraatira, organise une contre-table ronde à Tahiti le 2 juillet.

Le Président de la Polynésie française, Edouard Fritch s’est, lui, réjoui des avancées proposées par Emmanuel Macron, venu participer à la table ronde jeudi mais sans s’exprimer publiquement. «On a ressenti chez le Président de la République une vraie volonté de tourner cette page douloureuse pour nous tous avec les moyens qui doivent être mis en place demain, pour que les Polynésiens reconstruisent cette confiance que nous avons toujours eue avec la France, et c’est un signe fort qu’il a envoyé», a déclaré M. Fritch.

Ouverture des archives

La principale demande des historiens est l’ouverture des archives liées au nucléaire. «Il y a une clause particulière dans le code du patrimoine qui précise que tout ce qui a trait au nucléaire est incommunicable», explique l’historien Renaud Meltz, qui pilote une équipe d’une quinzaine de chercheurs sur l’histoire des essais. «Mais cette loi nous est parfois opposée pour nous empêcher de voir des archives qui ont trait aux conséquences sanitaires, aux oppositions politiques, aux chocs éventuellement culturels qu’il peut y avoir entre les Polynésiens et les métropolitains».

«Le Président de la République a confirmé l’ouverture totale des archives à la Polynésie française les archives portant sur des informations proliférantes mises à part», c’est-à-dire les informations qui permettraient à d’autres pays d’obtenir l’arme nucléaire, a déclaré Edouard Fritch. Vendredi, Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé, doit piloter une réunion sur les effets sur la Santé et Sébastien Lecornu, ministre des Outremers, présidera celle dédiée aux effets sur le territoire.

(AFP)