Compagnonnage Macky – ABC : Retour sur une relation complexe entre un président et son ancien ministre des Affaires étrangères…

 

Me Alioune Badara Cissé, décédé dans la journée de ce samedi, a symbolisé une « éloquence » et un « talent d’avocat » parfois « féroce » mais aussi avec « beaucoup d’humour ». Ses confrères racontent l’ex-médiateur de la République (comme) un « homme libre », mais fidèle à son compagnonnage avec le président Macky Sall.

« ABC » incarnait, jusque dans son style d’un autre temps, l’archétype de la « star » du Barreau, dont il fut l’une des figures pendant plus d’un quart de siècle. En politique, c’est le genre de leaders qui, comme Moustapha Cissé Lô, revendiquent leur « statut de membre fondateur » dans l’Alliance pour la République (Apr).

Et qui, par conséquent, n’avait pas la langue dans sa poche. Ses observations mordantes au sujet du gouvernement faisaient le plaisir des médias, ces dernières années. Il ne ménageait pas ses camarades de parti en critiques acerbes lors de ses multiples sorties.

Ce qui fait que les « incompatibilités d’humeur » ont toujours dominé ses relations avec certains membres de l’Apr, qui avaient demandé son limogeage en vain. Alors que des tensions semblent avoir surgi entre Macky et « ABC », ni l’un ni l’autre ne vont les alimenter. Une relation faite de « respect mutuel », dira de son côté le président de la République, venu présenter ses condoléances, après le décès du fils de l’avocat.

Les rumeurs de frictions entre les deux membres fondateurs de l’Apr ont enflé à mesure que les deux hommes semblaient implicitement se désavouer à chaque prise de parole. Il était dit que l’ancien ministre des Affaires étrangères a été « recasé » par Macky Sall à la médiature de la République, pour « isoler et museler un homme » par le « devoir de réserve ».

Dans leurs entourages respectifs, certains s’emploient à nuancer chaque tension, qui serait le fruit avant tout de leur parcours. Macky Sall, le libéral, Alioune Badara Cissé, réputé juriste, plus centralisateur et légaliste, en somme.

Dans la mouvance présidentielle, « ABC » a toujours fait valoir sa liberté de parole. Même en étant l’un des plus proches collaborateurs de Macky Sall, alors Premier ministre du Gouvernement de Abdoulaye Wade. L’avocat, par ailleurs, responsable de l’Alliance pour la république (Apr) était en 2005 le directeur de cabinet de l’actuel président de la République, quand ce dernier était à la Primature. Il a été nommé secrétaire général du Gouvernement dirigé à la même période.

Au Parti démocratique sénégalais (PDS), Me Alioune Badara Cissé et Macky Sall ne se sont certes pas juré fidélité. Mais, ils avaient fait vœu de silence, en cheminant ensemble aux côtés de Wade.

Quand Macky Sall a démissionné en 2008 de son poste de président de l’Assemblée nationale et de tous ses mandats électifs, ainsi que du PDS, l’histoire n’était pas finie. Alioune Badara Cissé n’avait pas hésité à suivre son « frère » Macky, refusant ainsi la main tendue du président Abdoulaye Wade. Rien ne les prédestinait à travailler ensemble à la tête de l’État.

Mais, par devoir de fidélité, Alioune Badara Cissé avait quitté son poste de premier adjoint au maire de Saint-Louis après les élections locales de mars 2009, pour conquérir le pouvoir aux côté de l’ancien maire de Fatick. À la présidentielle de 2012, lors du second tour, Macky Sall, soutenu par son « ami », mettait fin au règne du Parti démocratique sénégalais.

Le président Sall avait créé la surprise en choisissant Alioune Badar Cissé comme ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur, premier dans l’ordre protocolaire du Gouvernement. D’autant qu’il faisait partie de ceux que le président Macky Sall « écoute le plus », selon des « Apéristes ».

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