
ABIDJAN – Un président en exercice qui se cramponne sur son siège, face à deux de ses prédécesseurs qui veulent le déloger du palais, deux anciens Premiers ministres et un ex député qui veulent voir plus grand… La Côte d’Ivoire est suspendue aux mouvements et aux mots de six hommes de sa classe politique qui se disputent l’héritage de Félix Houphouët-Boigny : quatre candidats qui jouent aux chats et à la souris, et deux recalés qui veulent le costume de l’absent le plus présent. Dans cette seconde partie, Emedia vous présente Affiche Nguessan, Soro et KKB, les trois les plus jeunes, mais qui ont fini d’aiguiser leurs dents pour mordre la vieille garde…
KOUADIO KONAN BERTIN, LE CHALLENGER
Face à une partie de l’opposition empêchée de se présenter et une autre qui a décidé de boycotter le scrutin et d’appeler à la désobéissance civile, Kouadio Konan Bertin sera finalement le seul à se mesurer à Alassane Ouattara, ce samedi. Déjà candidat malheureux en 2015 lors de la réélection du président en exercice, KKB, qui avait alors récolté moins de 4% des voix, est quasiment assuré de faire un bien meilleur score et devrait, face à l’appel au boycott de Bédié et Nguessan, occuper la deuxième place à l’issue du dépouillement. Pour le symbole. Ou pour l’histoire.
Car à 51 ans seulement, celui qui se présente comme le candidat de la jeunesse face à des adversaires qui ont tous au moins 15 ans de plus que lui, se positionne surtout pour la course à la succession de la génération des vieux éléphants, en cherchant à profiter de la situation complexe de Guillaume Soro et en brandissant la carte de l’apaisement du climat politico-social. Pourtant, l’ancien député n’en est pas moins un bagarreur. Il y a cinq ans, il s’était déjà rebellé contre son parti d’alors, le PDCI de Bédié qui avait soutenu ADO. Un quinquennat plus tard, il se présente une nouvelle fois contre les deux ex alliés.
GUILLAUME SORO, LE DÉSOBÉISSANT
C’est le plus jeune des leaders de la classe politique ivoirienne, mais Guillaume Soro a déjà usé sa carapace au fil des années et des épreuves. Âgé de 48 ans, son nom est revenu tellement de fois dans l’histoire politique récente de la Côte d’Ivoire qu’il donne l’impression d’être un vieux baroudeur, témoin de toutes les époques. Passé de bras armé de Alassane Ouattara à son plus irréductible opposant, au point que ce dernier estime qu’il mériterait la prison à vie, Guillaume Kigbafori Soro a également roulé sa bosse dans plusieurs hautes stations de l’Etat ivoirien avant de fonder son mouvement, le GPS. Ex ministre de la défense, ex Premier ministre, ex président de l’Assemblée nationale, il a tout d’un homme qui maitrise les ficelles du jeu politique et sait jouer avec le feu. Au risque de se brûler ?
Contraint à l’exil par Ouattara, accusé de tentative de coup d’Etat en Burkina Faso, Soro jouit encore d’une très forte influence auprès d’une partie de la jeunesse et son ‘‘butin de guerre’’ fait qu’il est encore craint depuis qu’il a incarné l’aile dure de la bataille de rue en 1999 avec l’arrestation de plusieurs leaders du RDR, sous Henri Konan Bédié, finalement défait par un coup d’Etat de Robert Gueï. C’était il y a plus de vingt ans, et, depuis lors, Soro s’est opposé à tous les présidents, même à ceux avec qui il a pu s’allier. Rebelle dans l’âme.
PASCAL AFFI NGUESSAN, LE FRONDEUR
Pascal Affi Nguessan est de ceux qui ont partagé les premiers moments sombres de la descente aux enfers de l’ex président Laurent Gbagbo à qui il est resté longtemps fidèle. Des premières heures de la création de son parti, le FPI, qu’il a rejoint en 1986, à la sanglante fin de règne de Gbagbo pour laquelle il a subi une arrestation surmédiatisée, à côté du fils Michel Gbagbo, Pascal Affi Nguessan a, pendant des décennies, été le bras droit de l’ex président, son Directeur de Cabinet puis son Directeur de Campagne, mais également Premier ministre, son confident et son homme à tout faire, même quand il faut signer les accords de paix de Linas Marcoussis pour tirer le pays de sa première grande crise des années 2000.
Le compagnonnage a pris le chemin d’une rupture brusque quand l’ingénieur télécom Affi Nguessan a exprimé sa volonté de diriger de le FPI, face à la situation de son mentor, englué dans les dossiers du CPI. Pour les inconditionnels de Gbagbo, c’est une trahison difficilement pardonnable. Sauf que le hasard faisant bien les choses, le duo devenu duel au sein du FPI se retrouve aujourd’hui dans le même camp, pour combattre un adversaire commun.
Emediasn