Assassinat d’un physicien nucléaire : l’Iran promet une vengeance « terrible»

 

 

 

Des manifestants iraniens ont brûlé des photos du président américain Donald Trump et du président élu Joe Biden, à Téhéran, la capitale de leur pays, le 28 novembre 2020, au lendemain de l’assassinat de Mohsen Fakhrizadeh. Âgé de 59 ans, il était le chef du département recherche et innovation du ministère de la Défense. Le pays des Mollahs soupçonne Israël d’avoir commis l’assassinat avec la bénédiction des États-Unis. Téhéran promet de venger son scientifique.

 

À la fin de l’année 2019, les tensions entre les États-Unis et l’Iran s’exprimaient par des frappes sur des cibles réciproques, notamment en territoire irakien. Elles avaient atteint un sommet avec une démonstration hostile contre l’ambassade américaine à Bagdad, puis l’assassinat du général Qassem Soleimani, le 3 janvier 2020. Ce haut gradé a été tué par un drone américain. Il était le chef de la Force Qods, unité d’élite des Gardiens de la Révolution, l’armée idéologique de la République islamique. A ce titre, il était l’architecte de la stratégie du pays dans son environnement régional. Le 27 novembre dernier, Mohsen Fakhrizadeh, physicien nucléaire succombe à ses blessures après l’attaque menée contre sa voiture avec un véhicule chargé d’explosifs et une fusillade. Le scientifique était directement lié au programme du nucléaire de son pays. Téhéran impute la responsabilité de cette mort à Israël et aux États-Unis. Américains et Israéliens ont toujours juré que le pays des mollahs n’aura jamais la bombe atomique. Le président Donald Trump s’est retiré de l’accord sur le nucléaire iranien conclu, le 14 juillet 2015 à Vienne, entre l’Iran et les grandes puissances. Malgré les assurances de l’Agence internationale de l’énergie atomique sur le respect de l’accord par Téhéran, Trump, soutenu par le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu, a refusé de « certifier » l’accord.

Mohsen Fakhrizadeh sera vengé et la vengeance sera « terrible », promettent les dirigeants iraniens. Cité par le journal libanais, L’Orient-Le Jour, John Brennan, ancien directeur de la CIA qualifie l’assassinat du scientifique d’un « acte criminel et extrêmement dangereux ». Car selon lui, il risque d’entraîner des « représailles létales et une nouvelle phase de conflit régional ». Le chef du Hezbollah libanais, Hassan Nasrallah, relais du régime iranien au Proche Orient, aurait récemment suggéré de frapper les réserves de nitrate d’ammonium de Haïfa la ville portuaire d’Israël. « Frapper cette ville et tuer un grand nombre de personnes mènerait à la dissuasion car les États-Unis et le régime israélien » ne seraient en « aucun cas prêts à prendre part à une guerre et à une confrontation militaire », analyse l’iranien Sadollah Zarei (i24-News).

Dans une lettre au secrétaire général de l’ONU, l’ambassadeur iranien auprès de l’Organisation, Majid Takht Ravanchi avait, lui, réclamé vendredi dernier à Antonio Guterres et au Conseil de sécurité une « condamnation de l’assassinat de Mohsen Fakhrizadeh ». Car dans ses dernières occupations, le scientifique « supervisait le développement d’un vaccin » contre la pandémie de COVID-19. Israël, le principal accusé  dans ce dossier a, à travers un de ses ministres, déclaré samedi n’avoir « aucune idée de qui est le responsable » de la mort du scientifique iranien. Le ministre a, aussi, ajouté que cet assassinat avait « réellement embarrassé l’Iran ». Sur la toile israélienne certains regrettent que l’Iran soit victime de sa propre politique. «Toute vie perdue est un drame », écrit un internaute sur une page Facebook. Il poursuit « Mais je ne peux m’empêcher d’établir une comparaison entre une vie perdue qui est, je le répète très déplorable, et l’appel constant de l’Iran à détruire tout un peuple. L’Iran doit revoir son idéologie politique en admettant que chacun, malgré nos différences a le droit à la vie. L’Iran est victime de sa politique ».Que vaut vraiment la menace de l’Iran ? Des éditorialistes de la presse arabe estiment que la menace de représailles est, sans doute, à prendre au sérieux. Même si cela rejoint la rhétorique anti-américaine et anti-israélienne habituelle. La tâche s’annonce compliqué pour le président élu américain Joe Biden qui signale son intention de reprendre le dialogue avec Téhéran.

Le général iranien Qassem Soleimani a été tué par une frappe de l’armée américaine, le 3 janvier en Irak. Le 27 novembre 2020, à Téhéran le physicien nucléaire Mohsen Fakhrizadeh succombe de ses blessures après l’attaque de sa voiture. Une action attribuée, à tort ou à raison, au service de renseignement extérieur israélien, le Mossad. Dans les deux cas, le régime iranien promet de se venger. En tout cas, autant dire qu’au Proche et Moyen Orient, l’année 2020 semble donc se terminer comme elle avait débutée. C’est-à-dire par des assassinats ciblés et de fortes tensions politico diplomatiques entre Iraniens d’une part et Américains et Israéliens d’autre part. L’ONU, elle, appelle tout le monde au calme.

Pierre Boubane,

à Beyrouth