
Cela fait presque une année qu’en Afrique de même qu’en Europe, la pandémie de la Covid-19, a provoqué la propagation d’un virus virulent né en Asie. Cette pandémie a profondément changé la perception de la mobilité humaine, en liant la menace épidémiologique à la libre circulation des personnes.
En Afrique, la crise de la Covid-19 tantôt met en lumière les malaises socio-économiques qui poussent à réfléchir sur les réelles opportunités qui sont en face de nous en vue d’une bonne exploitation.
Dans ce rapport 2020 de ‘Policy Center’ sur l’etude concernant les effets de la pandémie dans l’economie Africaine, il a été examiné dans un de ses chapitres, les conséquences de la pandémie sur la mobilité africaine vers l’Europe, mais également sur les facteurs aggravant ce phénomène qui n’est nullement nouveau dans ce continent noir.
Il est question d’abord de lancer un regard au point de vue économique, l’essence même de l’émigration africaine qui est motivée par la recherche de meilleures opportunités économiques à l’étranger.
Le rapport nous indique que : c’est l’illustration de la théorie de « Push and Pull factors » démontrant que, de manière générale, les migrations internationales se produisent en raison des différences de prospérité entre les pays d’origine et ceux de destination. D’une part, et le plus souvent, les pays d’origine des émigrés comptent plusieurs facteurs (Push). On peut citer la pauvreté, taux élevé de chômage des jeunes, infrastructures faibles et services publics inadéquats poussant leurs ressortissants à chercher des opportunités à l’étranger.
D’autre part, nous pouvons dire que les pays de destination présentent des facteurs d’attraction attirant les immigrés désireux d’améliorer leurs conditions de vie, notamment de meilleures perspectives économiques, une stabilité politique et institutionnelle, des possibilités d’emploi, etc. Ainsi, il sera en toute analyse, il ne faudra pas perdre de vue que, plus les conditions socio-économiques dans les pays d’origine se détériorent, plus leurs ressortissants seront tentés de partir à l’étranger, en l’occurrence pour les émigrés africains qui tentent de s’orienter vers l’Europe qui demeure la destination de premier choix pour les Africains.
Pour le cas de la Covid-19, il est vrai que tous les pays ont été touchés par la crise, et les pays européens ont même été plus violemment secoués que les pays africains, mais l’écart des niveaux de développement reste très important. Ce qui poussera toujours une catégorie des ressortissants africains à vouloir émigrer en Europe, même si celle-ci présente moins d’opportunités de travail, ce qui est déjà le cas depuis la crise économique et financière de 2008.
D’ailleurs, la forte reprise des flux migratoires clandestins en Méditerranée, depuis juin 2020, conforte l’hypothèse avancée plus haut, et alerte sur l’impératif d’anticiper une crise migratoire qui risque de surgir dans les court et moyen termes, à la suite des répercussions économiques de la pandémie.
Nous pouvons également noter l’aspect psychologique qui est , quant à lui, plus compliqué à appréhender. D’une part, la Covid-19 a impliqué une forme d’immobilité immédiate. Plusieurs immigrés vivant à l’étranger ont été privés de la possibilité de retourner dans leurs pays d’origine en raison de la fermeture des frontières. Ceci pourrait impacter les décisions de certaines catégories d’immigrés quant à l’installation durable dans un pays étranger, dans le contexte de la crise sanitaire actuelle ou d’autres crises de nature similaire, qui pourraient impliquer une fermeture subite des frontières induisant une séparation forcée de la famille et des proches.
Si, en plus, les opportunités de travail se resserrent, il risque d’y avoir plus de retours parmi les émigrés africains en Europe. D’ailleurs, une étude de l’Organisation internationale des Migrations (OIM, 2010) montre que les deux années qui ont suivi la crise financière de 2008 ont connu une augmentation du taux de retour des immigrés de 20% en Europe.
À l’autre bout du spectre, la nature de la crise actuelle pourrait provoquer chez certains immigrés une panique semblable à celle ressentie chez les travailleurs nord-africains en Europe dans les années 1990, au lendemain de la signature du règlement Schengen par l’Espagne et l’Italie qui rendait l’accès et le travail dans ces deux pays auparavant sans visa-, tributaires de l’obtention d’un visa.
Le résultat était que plusieurs immigrés avaient préféré rester en Europe même en dépassant la durée de leurs titres de séjour, par crainte de ne pas se voir livrer de visa s’ils retournent dans leurs pays d’origine. Il est, certes, difficile de mesurer cet impact, mais il demeure pertinent de s’y intéresser. La réponse des Etats africains à la Covid-19 a beaucoup varié selon les pays.
Alors que certains gouvernements africains ont mis en place des politiques de mitigation ayant permis la mise en place de systèmes de couverture sociale ad-hoc pour les plus vulnérables, comme le cas du Maroc, d’autres pays africains se sont trouvés dans des situations de détresse sociale avec des rapports conflictuels entre les forces de l’ordre et les citoyens, qui, faute d’alternatives, violaient les mesures de confinement pour poursuivre leurs activités professionnelles journalières. Ainsi, la perception du rôle de l’Etat et sa gestion de la crise peuvent aussi constituer des facteurs de motivation pour vouloir immigrer dans des pays plus développés dotés de meilleurs systèmes de couverture sociale.
Au terme de cette analyse, Policy Center estime que ces effets de la crise actuelle sur l’émigration africaine sont divers et complexes. Il serait prétentieux de les énumérer tous, d’autant plus qu’il s’agit d’une situation inédite, où le social, l’économique et le psychologique s’entremêlent pour façonner le futur de la mobilité africaine.
D’un côté, la dégradation des conditions économiques dans les pays d’origine aggraverait les causes profondes de l’émigration illégale et de l’autre, le durcissement des conditions de vie des immigrés en Europe favorise potentiellement un retour plus important parmi ceux qui ne trouvent pas d’opportunité d’emploi dans les pays d’accueil. Ces facteurs changeront plusieurs aspects du partenariat euro-africain.
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