
Ainsi donc, les élections territoriales et municipales sont une variable d’ajustement dans notre pays. En principe, elles devraient avoir lieu ce dimanche 28 mars 2021 en vertu de la loi après un premier report. On n’en restera pas là. La décision d’un nouveau renvoi a été actée solennellement en conseil des ministres. Le reste appartient à l’assemblée nationale.Depuis décembre 2019, le premier rendez-vous manqué, c’est la traversée du désert démocratique. Les citoyens étant privés de droit de suffrages. Techniquement, le compte n’est pas bon.
Les planètes ne sont pas alignées, si on suit le diagnostic de la majorité. Pour leur part, l’opposition, les non-alignés et la société civile goûtent fort peu aux stratagèmes et à la mauvaise foi en cours. Sur la question, évoquer un désaccord est assez faible. C’est une fracture nette. L’audit du fichier électoral et l’évaluation du processus par des experts auraient bon dos. La commission cellulaire du dialogue est cacophonique. Le mal est fait. Ou alors pour ne pas trop mousser, ce qui est fait est fait. Les locales, comme ça se disait, sont ajournées sine die. Peut-être, auront-elles lieu en février 2022. Les élus auront de facto un bonus supplémentaire de magistère. Ils sont dans la légalité mais plus que jamais en mal de légitimité.
Au fait, que nous disent ces reports de scrutin en cascade ? L’on voit bien que les municipales sont démonétisées, traitées en parent pauvre. Singulière erreur. Elles sont plus importantes que tout. Peut-être même plus impactantes que la présidentielle ou que les législatives dans le quotidien des administrés.Les villes, communes et départements les mieux entretenus, les plus sûrs et les plus heureux au monde ont, en règle générale, à leur tête, des maires, conseillers et présidents régulièrement élus ou nommés, dont les mandats ne sont pas usurpés et sans cesse rechargeables.
Les bilans qu’ils rendent en termes de gestion de leurs cités font du reste qu’ils soient parmi les plus appréciés du Landerneau. Ils ont souvent une cote de popularité que les autres politiques envie et jalousent. Chez nous,les dernières élections municipales se sont déroulées le 29 juin 2014. Un septennat plus tard, les 552 communes, 5 villes et les départements devront être renouvelés au plus vite sans aucune forme de calcul politicien. La vitrine démocratique sénégalaise s’est craquelée.
Fendillement, fracture, ligne Maginot. L’opposition rassérénée surenchérit en enfilant ses exigences. Tenir les élections ici et maintenant, excommunier le procureur et doyen des juges, perdre l’appétit du 3ème mandat, en finir avec le flou artistique. Une longue et excessive litanie qui pourrait faire tomber dans le piège des dérives maximalistes. La clef de voûte des institutions ne peut pas scier toutes ses branches. Le désarroi de la jeunesse, les crises proteiformes engendrées par le Covid sont des dossiers urgents à écluser. Et le président sait mieux que le monde que le temps lui est compté. Il ne peut plus musarder.
L’éclaircie dans la grisaille démocratique serait peut-être liée à la sortie de prison de Guy marius et compagnie ainsi que les cadres du pastef. La préservation du climat de sérénité est à ce prix. L’orage est passé. Mais le vent mauvais des crispations n’est pas si loin. Il est susceptible de se lever à force de faux pas collectifs. À force de jouer aux funambules qui dansent à longueur d’année au bord du précipice. Quel que soit le bord où l’on se situe, gardons toujours à l’esprit que le Sénégal est plus grand que nous.
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