
France 24 et RFI deux médias français, dont on connaît leur influence en Afrique francophone, ont couvert le Forum de Dakar sur la Paix et la Sécurité en Afrique les 6 et 7 décembre dernier. En marge de ce grand rendez-vous, les deux médias ont réalisé une interview avec le Président de la République, Macky Sall. Le Chef de l’Etat sénégalais a évoqué plusieurs sujets dont son arrivée à la présidence de la Conférence des Chefs d’Etats des pays membres de l’Union Africaine (UA). En Afrique, l’année 2021 se termine comme elle avait commencé : du djihadisme ici, de la rébellion là-bas, des coups d’Etats militaires ailleurs et COVID-19 partout. Avec ses pairs africains, Macky Sall fera face à tous ces nombreux défis sur le continent. Sur le plan de la politique intérieure il a, brièvement, évoqué le dossier Sonko-Sarr. Ce dossier sera vidé, promet-il. Sur sa candidature à la prochaine présidentielle de 2024, ce n’est pas le moment d’en parler, s’est-il défendu. Le temps est au travail. A-t-il été convaincant ? Chacun appréciera cette sortie médiatique.
Ensuite, France 24 et RFI tendent leurs micros à un opposant, Khalifa Sall, ancien maire de Dakar qui est de retour sur l’arène politique, après sa sortie de prison pour des accusations de détournement de fonds publics dans sa mairie. L’opposant critique Macky Sall et sa politique. Jamais excessif dans ses prises de paroles publiques, toujours élégant dans le langage, K. Sall n’apprécie pas le traitement infligé à l’opposition par le régime en place surtout à la veille des élections locales de janvier prochain. Mais l’opposition restera debout et se battra. Il annonce qu’il sera candidat à l’élection présidentielle de 2024, « Inch’Allah », se remet-il à la volonté du Tout-Puissant.
Nous autres, simples journalistes et observateurs attendions la sortie de Ousmane Sonko que des Sénégalais présentent comme le principal opposant au régime de Macky Sall. A-t-il décliné la demande d’interview des médias français ? Ou a-t-il été zappé ? L’interrogation est permise. Sonko est une figure de taille. Peut-on le museler ? Si nous partons de l’idée que France 24 et RFI, dont on sait qu’elles sont la voix de la France à l’international, l’ont ignoré, alors l’on peut, aussi, se demander si la France n’est pas en train de choisir son opposition au Sénégal ? En mémoire nous vient cette phrase d’un analyste politique sur la politique de la France en Afrique : « La France flatte le pouvoir, ménage l’opposant, aide le maquisard ». Et d’ajouter : « Quels que soient les secousses et l’intensité des secousses, les intérêts français surnagent ». Avec une rhétorique peu orthodoxe (voire belliqueuse selon les appréciations), anticolonialiste et antisystème, comme il se présente, l’opposant Sonko inquiète-il autant au Nord de la Méditerranée ? Avec lui à la tête du pays que seront les intérêts de la France au Sénégal ? Est-il déjà fiché comme un élément hostile à la France ? Si, effectivement, Sonko est le prochain Président de la République du Sénégal, c’est à réfléchir sur le type de relations que le Sénégal aura avec l’Occident en général et la France en particulier. Le Sénégal saura-il résister aux représailles d’une diplomatie de rupture celle qui serait développée par le Président Sonko ? Voici quelques questions que nous nous autorisons.
Pour l’instant parlons des faits. Alors que les Sall (Macky et Khalifa) s’exprimaient sur les ondes de France 24 et RFI, Sonko s’affichait sur les réseaux sociaux en compagnie d’un leader politique nigérien en séjour au Sénégal et avec qui il partage les mêmes convictions politiques sur l’avenir de l’Afrique.
Pierre Boubane / Journaliste à Tchad & Culture, à N’Djaména (Tchad)