Irak: Nouri al-Maliki renonce au pouvoir

 

Le chiite irakien Nouri al Maliki a renoncé à s’accrocher à son poste de Premier ministre. Il soutient désormais son successeur Haïder al Abadi, rapporte jeudi soir la télévision d’État irakienne.

Nouri al Maliki, qui contestait avec vigueur la nomination d’un nouveau chef du gouvernement ces derniers jours, avait été appelé par nombre de chefs d’État et de représentants religieux, notamment chiites, à laisser son poste. Haïder al Abadi est considéré comme capable de former un gouvernement d’union afin notamment d’affronter la menace de l’État islamique.

Ses détracteurs imputent à Nouri al-Maliki le chaos dans le pays à sa politique d’exclusion des sunnites et son autoritarisme pendant ses huit années au pouvoir. C’est cette marginalisation de la minorité sunnite dans un pays majoritairement chiite qui a favorisé selon eux l’offensive des djihadistes sunnites.

Les frappes US continuent

Le président Barack Obama a annoncé jeudi que les frappes aériennes américaines contre les djihadistes avaient brisé le siège des monts Sinjar, dans le nord de l’Irak, où s’étaient réfugiés des milliers de yezidis.

Dans le même temps, la communauté internationale intensifiait ses efforts pour fournir de l’aide humanitaire aux personnes déplacées par l’offensive des combattants de l’Etat islamique (EI) dans le nord-ouest du pays ainsi que des armes et du matériel aux forces kurdes qui luttent contre eux.

Incertitudes quant au nombre de réfugiés

Le Haut commissariat de l’ONU aux réfugiés avait estimé il y a quelques jours à plusieurs dizaines de milliers le nombre de déplacés, en majorité de la minorité kurdophone et non musulmane des yezidis, pris au piège sans vivres et sans eau dans les montagnes de Sinjar, après avoir été chassés de chez eux par les djihadistes .

L’incertitude demeure sur le nombre de personnes encore dans les monts Sinjar, Washington ayant affirmé mercredi à la suite d’une mission de reconnaissance que les déplacés étaient «beaucoup moins nombreux» et vivaient dans «de meilleures conditions» qu’attendu.

Depuis quelques jours, plusieurs milliers de yezidis ont en effet réussi à quitter la montagne, a expliqué le porte-parole du Pentagone, le contre-amiral John Kirby.

Les djihadistes avancent

Des centaines de milliers de personnes ont été jetées sur les routes par l’offensive fulgurante lancée le 9 juin par l’EI qui s’est emparé de pans entiers du territoire au nord, à l’ouest et à l’est de Bagdad.

Depuis une dizaine de jours, les djihadistes ont avancé vers le Kurdistan autonome, chassant des dizaines de milliers de membres des minorités chrétienne et yazidie de leurs villes, à Sinjar et Qaraqosh notamment, tombées aux mains de l’EI. Les forces kurdes dépassées tentent de les freiner.

Témoins de l’horreur

A Dohuk, au Kurdistan autonome où nombre d’entre eux ont trouvé refuge après avoir fui via la Syrie, les déplacés très affaiblis témoignent de l’horreur survenue dans leurs villages à l’arrivée des djihadistes , qui ont pourchassé les yezidis dans les rues, abattant des jeunes hommes et enlevant les femmes.

«Ils disaient aux gens que soit ils rejoignaient l’islam — leur islam — soit ils allaient mourir», raconte Hamid Kurdo, précisant qu’on leur avait donné 72 heures pour choisir

Pour leur venir en aide, le Royaume-Uni a livré plus de 48’000 litres d’eau potable, plus d’un millier de lampes marchant à l’énergie solaire ainsi qu’un millier d’abris visant à se protéger de la chaleur.

Livraisons d’armes

Parallèlement à l’aide humanitaire, les Occidentaux ont décidé d’envoyer des armes aux forces kurdes.

Après les Etats-Unis, la France a annoncé qu’elle leur livrerait des «armes sophistiquées» dans les prochaines heures, et Londres a dit qu’elle acheminerait celles de pays tiers.

Berlin va envoyer vendredi à Erbil, la capitale du Kurdistan irakien, quatre appareils Transall chargés de 36 tonnes de ravitaillement et de matériel médical, selon l’agence DPA. La coordination entre les pays a été difficile à organiser.

Mesures du Conseil de Sécurité de l’ONU

Le Conseil de sécurité de l’ONU votera vendredi des mesures visant à couper les vivres, en hommes et en argent, des djihadistes en Irak et en Syrie. Le projet de résolution, présenté par le Royaume-uni, pourrait constituer la réponse la plus forte à ce jour du Conseil face à l’avancée des djihadistes .

Parallèlement, l’Union européenne doit tenir vendredi à Bruxelles une réunion d’urgence des ministres des Affaires étrangères.

Nouveau premier ministre en Irak

Sur le plan politique, le Premier ministre désigné Haïdar al-Abadi, qui a obtenu un soutien international massif, doit désormais former un gouvernement d’union appelé à rassembler toutes les forces politiques dans un pays miné par les divisions. Il a jusqu’au 9 ou 10 septembre pour le faire.

Mais le Premier ministre sortant Nouri al-Maliki, même s’il a été lâché par ses alliés iranien et américain et des membres de son bloc chiite, auquel appartient Haïdar al-Abadi, s’accroche à son poste.

(afp/Newsnet)