IRAK: Les décapitations de l’EI provoquent l’effroi des musulmans

 

 

En utilisant de manière spectaculaire la décapitation, l’Etat islamique (EI) cherche à terroriser la communauté internationale et la population sous sa botte. Cette pratique provoque toutefois la répulsion chez les musulmans que l’EI prétend représenter.

Mardi, le groupe djihadiste, le plus radical a posté une nouvelle vidéo de cinq minutes montrant la décapitation de Steven Sotloff, le second journaliste américain à subir ce châtiment en deux semaines.

Les Etats-Unis se sont déclarés «écœurés» par cette vidéo qui a provoqué une vague d’indignation et de peur, sentiments que les ultra-radicaux cherchent à susciter, selon les experts.

Tactique psychologique

Les militants de l’EI affirment être «les seuls vrais musulmans» et ont recours au meurtre et au chaos comme tactique psychologique pour terroriser les autres gens, assure Asma Afsaruddin, professeur au département d’études des religions de l’Université d’Indiana, aux Etats-unis.

Diffuser les vidéos mettant en scène le supplice de Steven Sotloff et celui de son collègue James Foley ont «un objectif très clair: l’intimidation», explique Rita Katz, directrice de SITE, un groupe privé qui suit les mouvements extrémistes. «La brutalité qui transparaît dans cette vidéo a un objectif, celui de dire: ne nous affrontez pas», souligne-t-elle.

Plusieurs décapitations

La décapitation est devenue le mode opératoire de l’EI contre ses adversaires. Qu’il s’agisse des soldats gouvernementaux irakiens ou syriens, ou des militants qui s’opposent à ses méthodes brutales.

Et ce procédé s’est révélé efficace. La peur a jeté sur les routes en Irak comme en Syrie des centaines de milliers de personnes, et en Irak de nombreux soldats ont fui sans combattre.

Un but «publicitaire»

L’usage par les djihadistes de la décapitation n’est pas nouveau. Le premier Occidental à subir ce supplice fut Daniel Pearl au Pakistan en 2002.

Il a été ensuite pratiqué par les groupes affiliés à Al-Qaïda en Irak, qui fut le précurseur de l’EI sous la houlette d’Abou Moussab al-Zarqaoui. Avec sa mort lors d’un raid américain en 2006 et le rejet de cette organisation par les tribus sunnites, cette méthode avait décliné.

Elle est revenue en force avec l’émergence de l’EI et la création d’un «califat» à cheval sur la Syrie et l’Irak. Pour la directrice de SITE, les vidéos ont un but publicitaire afin de «recruter une petite minorité de musulmans radicalisés, impressionnés par cette violence. Elle l’interprétera comme une sorte de victoire».

Répulsion et colère

Mais chez une très large majorité des 1,1 milliard de sunnites musulmans, les méthodes brutales de l’EI suscitent répulsion et colère.

«Les actes et les pratiques de l’EI sont totalement étrangers au message de la foi musulmane», assure cheikh Khaldoun Araymit, secrétaire général du Conseil suprême de la loi islamique au Liban. «L’islam, c’est la compassion et l’amour et la communication avec l’autre», selon lui.

Message du Prophète

«L’interprétation dévoyée du Coran par ces mouvements terroristes les éloigne du message du Prophète et les exclut de la communauté des croyants», a réagi le recteur de la mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, au nom de la communauté musulmane de France, la plus importante d’Europe.

De nombreux musulmans expriment des sentiments similaires sur la toile, dénonçant sur Facebook et Twitter chaque méfait commis par l’EI. Qu’il s’agisse de la crucifixion de Syriens ou la vente à des djihadistes de femmes yazidies enlevées en Irak.

Actions criminelles

Les dignitaires religieux musulmans affirment qu’il n’y a pas de crime pour lequel la religion prescrit la décapitation, mais cette pratique fut répandue par les musulmans et non-musulmans durant les guerres à l’époque de Mahomet et après. Ce type de supplice demeure en Arabie Saoudite, provoquant les critiques des associations de défense des droits de l’homme.

Al-Azhar, la plus haute autorité religieuse sunnite, a rejeté l’EI et ses pratiques. «Ces actions criminelles n’ont rien à voir avec l’islam. Elles n’ont aucun fondement dans la loi islamique. Ces gens ne représentent pas l’islam», a affirmé cheikh Abbas Shoman.(ats/Newsnet)