Menacée de viol après sa vidéo sur le harcèlement

 

Dans une vidéo mise en ligne mardi 28 octobre et devenue virale depuis (près de 9 millions de vues à l’heure où cet article est publié, voir ci-dessus), une jeune femme, l’actrice Shoshana B. Roberts, marche en silence dans les rues de New York, vêtue d’un t-shirt et d’un jean noirs. On l’y voit se faire apostropher par des hommes plus ou moins lourds, plus de 100 fois sur 10 heures, certains allant jusqu’à la suivre pendant de longues minutes. (Voir l’article: Voilà à quoi ressemble le harcèlement de rue)

Carton plein pour l’association Hollaback!, à l’origine de la vidéo, qui lutte contre le harcèlement de rue. Magie du buzz: un débat national a émergé aux Etats-Unis, dépassant même les frontières sur le web. Entre conférences et menaces de morts, Emily May, cofondatrice de Hollaback!, nous raconte sa folle journée.

Comment est venue l’idée de cette vidéo, «Dix heures de marche à New York dans la peau d’une femme»?

Tout a commencé grâce à l’idée d’un réalisateur, Rob Bliss. Il était convaincu que c’était important, que si les gens savaient ce à quoi ressemblait le quotidien des femmes, ils y réfléchiraient à deux fois. Et nous étions parfaitement d’accord avec lui à Hollaback! Nous lui sommes vraiment reconnaissants. (ndlr: Les interactions de Shoshana B. Roberts, qui tient un micro dans chaque main, sont filmées par Rob Bliss, marchant juste devant elle, grâce à une caméra GoPro cachée dans un sac de sport).

Que répondez-vous à ceux qui affirment que la vidéo est totalement mise en scène?

Si seulement! (Rires) J’aimerais qu’on ait à payer les gens pour agir de la sorte. Malheureusement, non, les gens étaient tous des volontaires…

La réaction a été globalement très positive, mais vous faites allusion à des menaces sur votre compte Twitter. De quelles menaces s’agit-il?

Nous avons reçu suite à la mise en ligne de la vidéo hier, au bureau, une dizaine d’appels de menaces, et des commentaires très violents bien sûr sur les plateformes vidéos comme Youtube. Je ne les ai pas tous lus, il y a eu énormément de réactions. Des menaces de morts, et des menaces de viol. Shoshana B. Roberts en a même reçu directement sur son mail personnel. Vous savez, les gens qui vous agressent dans la rue sont souvent ceux qui vous agressent en ligne. Malheureusement, nous n’avons pas été très surpris. On fait ce qu’on peut… Nous avons contacté la police et demandé à Youtube de supprimer les commentaires inappropriés.

Dans un monde idéal, selon vous, quelle devrait être la réponse politique au harcèlement de rue?

Notre objectif est que les responsables politiques consacrent un budget à cette cause, afin que l’on puisse aller dans toutes les écoles du monde, parler aux élèves dès un très jeune âge, leur dire que ce type de harcèlement n’est pas acceptable. Il s’agit de ne pas laisser cette culture du sexisme s’installer, en en parlant le plus tôt possible. Dire aux filles que si ça leur arrive, cette expérience a un nom, et qu’elles peuvent agir. Mais aussi créer des campagnes partout, pour les moins jeunes qui ne sont pas à l’école, par le biais d’affiches, de spots etc. Faire savoir que c’est un problème.

Certaines de nos lectrices affirment que les commentaires dans les rues en France ou en Suisse sont beaucoup plus crus que ceux auxquels est exposée l’actrice à New York. Que souhaiteriez-vous leur dire pour faire changer les choses?

Chaque pays, chaque culture a une forme propre de harcèlement de rue, et a donc besoin d’une campagne sur mesure. En Suisse comme partout, on doit s’attaquer au problème du harcèlement de rue au niveau local, avec un message local. Hollaback! a par ailleurs des antennes dans 26 pays, mais aucune en Suisse. A bon entendeur!

(Newsnet)