Tchouri: la comète se révèle dure, froide et contient des molécules organiques

C’est un monde nouveau qui s’ouvre chaque jour un peu plus devant nos yeux ébahis. Depuis l’atterrissage de Philae sur la comète Tchouri, le 12 novembre, les premiers résultats des expériences menées par l’atterrisseur sont diffusés peu à peu. «Même si le robot a connu des problèmes à l’atterrissage et qu’il se retrouve aujourd’hui en hibernation faute d’énergie, il a pu envoyer beaucoup de données avant de s’endormir, souligne Stéphane Berthet, vice-président de la Commission fédérale des affaires spatiales (CFAS). Plus de 80% des expériences prévues ont été réalisées. C’est une réussite extraordinaire.»

Première indication: Tchouri s’avère très froide. Les thermomètres de Philae ont en effet enregistré des températures oscillant entre -150 et -170 °C. L’instrument Mupus, une sorte de petit marteau, a quant à lui frappé la surface. Résultat: il n’est pas parvenu à s’enfoncer au-delà de quelques millimètres dans le sol, a révélé l’Agence spatiale européenne (ESA) le 18 novembre. «La surface apparaît très dure, un peu comme de la glace, explique Stéphane Berthet. Ce n’est pas ce à quoi on s’attendait. Comme la densité totale de la comète, mesurée par la sonde Rosetta, s’avère assez faible, on imaginait plutôt un sol meuble. Mais il semble en fait que Tchouri possède une sorte de carapace dure en surface et qu’elle est davantage poreuse en profondeur.»

Selon les premiers éléments recueillis par l’instrument Cosac, l’environnement proche de la comète paraît constitué de glace, de poussières et de molécules organiques. Quel est l’intérêt de ces dernières? «Elles sont nécessaires à l’apparition de la vie, répond Stéphane Berthet. Si des molécules complexes – comme des acides aminés – sont découvertes, cela confirmera l’hypothèse selon laquelle ce type de composés a été apporté sur Terre par le biais de comètes.» Mais nous n’en sommes pas là. «Des éléments organiques ont bien été trouvés sur Tchouri, rapporte Michel Cabane, chercheur au Laboratoire atmosphères, milieux, observations spatiales (Latmos) et membre de l’équipe Cosac. Mais pour le moment, nous ne savons pas s’il s’agit de molécules simples ou complexes. Pour identifier les structures compliquées, notre appareil les découpe en petits morceaux. Il faut ensuite reconstruire le puzzle à partir des pièces dont on dispose. C’est ce que nous sommes en train de faire. D’ici à un mois, nous connaîtrons le degré de complexité de ces briques de matière carbonée.»

L’appareil Rosina de la sonde Rosetta avait déjà identifié plusieurs molécules organiques, notamment du monoxyde de carbone (CO), du dioxyde de carbone (CO2), du méthane (CH4), du méthanol (CH3OH) et du formaldéhyde (CH2O). Reste à savoir si Philae a trouvé des structures plus complexes. En ce qui concerne l’intérieur de la comète, il faudra attendre davantage: «Les données du forage ne sont pas probantes, poursuit Michel Cabane. Peut-être pourrons-nous redémarrer cet appareil au printemps prochain.»

(TDG)