
Chérif Kouachi, 32 ans, recherché avec son frère Saïd, 34 ans, dans le cadre de la tuerie de Charlie Hebdo, est loin d’être un inconnu des services antiterroristes français. Le cadet de la fratrie faisait partie d’une filière qui envoyait des djihadistes rejoindre les rangs d’Al-Qaida en Irak, alors dirigé par Abou Moussab Al-Zarkaoui. Condamné en 2008 à trois ans de prison, dont la moitié avec sursis, il avait fini de purger sa peine. Les deux suspects avaient fait l’objet d’une surveillance, mais aucun élément ne présageait d’un passage à l’acte imminent, selon le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve.
Né en novembre 1982 de parents immigrés d’Algérie, Chérif, alias Abou Issen, et ses quatre frères et sœurs grandissent dans le Xe arrondissement de Paris. Orphelin à 12 ans, il est placé dans un foyer à Rennes où il passe un brevet d’éducateur sportif avant de regagner Paris avec son frère Saïd. Il avait «plus le profil du fumeur de shit des cités que d’un islamiste du Takfir», rapportait en 2005, lors de son arrestation, son avocat Me Vincent Ollivier au journal Libération. Il se définissait comme «un musulman occasionnel», «choqué» «par l’intervention américaine en Irak et par les exactions des marines à Abou Ghraib», avait-il précisé.
En 2003, Chérif prend un virage religieux. Il commence à fréquenter la mosquée Adda’wa, dans le quartier Stalingrad, où il entend pour la première fois parler du djihad au contact de Farid Benyettou, un prédicateur du XIXe arrondissement qui prêche après l’office auprès des plus jeunes. A 21 ans, Chérif devient un «élève assidu», il rentre dans le rang, mais se radicalise. Poussé par Benyettou, il intègre la «filière irakienne du XIXe arrondissement» dite «des Buttes-Chaumont». Entre 2003 et 2005, cette organisation aurait incité une dizaine de jeunes Français âgés de moins de 25 ans et domiciliés dans ce quartier, à partir combattre en Irak. «Plus le départ approchait, plus je voulais revenir en arrière. Mais si je me dégonflais, je risquais de passer pour un lâche», avait expliqué Chérif Kouachi à la barre en 2008, selon Le Monde.
L’apprenti djihadiste a été interpellé le 25 janvier 2005, alors qu’il s’apprêtait à décoller pour Damas afin de rejoindre l’Irak. Son nom a une nouvelle fois été cité en 2010, dans un projet de tentative pour faire évader de prison l’islamiste Smaïn Aït Ali Belkacem, ancien membre du Groupe islamique armé algérien (GIA). Mis en examen, il a bénéficié d’un non-lieu. Chérif Kouachi a ensuite disparu des écrans radar, jusqu’à cette tragique journée de mercredi.
(24 heures)