Nucléaire iranien: La guerre des clans pèse sur les tractations de Genève

 

Réunis à Genève depuis dimanche, les grandes puissances et l’Iran reprennent les négociations pour tenter de débloquer le contentieux nucléaire qui empoisonne leurs relations depuis douze ans. Alors qu’un accord-cadre pourrait être finalisé d’ici le mois de mars, la nouvelle date butoir pour la signature d’un accord définitif a été fixée au 30 juin.

L’objectif de la République islamique est d’obtenir la levée totale et immédiate des sanctions financières et internationales, tout en gardant la tête haute face à une opinion publique qui, dans son ensemble, demeure intransigeante sur son programme nucléaire. Qu’il soit à des fins civiles ou militaires.

Mais après deux échecs, les négociations semblent être plus que jamais au cœur du conflit qui oppose le président modéré Hassan Rohani à ses adversaires politiques, l’aile dure du régime.Depuis son arrivée au pouvoir, les marges de manœuvre du président ont constamment été réduites par les factions conservatrices, présentes en majorité dans les instances législatives et judiciaires.

C’est lors d’une conférence sur l’économie à Téhéran le 4 janvier que Hassan Rohani a décidé de confronter ses détracteurs. Seul un changement de cap dans la politique étrangère de l’Iran pourra remettre le pays sur pied. «L’économie est dans un tel état qu’elle ne peut plus être l’otage d’une idéologie anti-occidentale», a-t-il déclaré. Et face à la corruption qui gangrène le pays, le président a pris pour cibles les «monopoles économiques exonérés d’impôts» des gardiens de la Révolution. Ces derniers, profitant des sanctions et de l’absence de concurrence étrangère sur le marché iranien, contrôlent désormais les secteurs les plus stratégiques du pays.

Mais ce jour-là, à la surprise générale, Hassan Rohani a aussi évoqué la tenue d’un référendum pour «solliciter l’opinion sur des questions importantes qui concernent la vie des citoyens». S’il est peu probable que cette initiative lui soit accordée par un vote des deux tiers du parlement, le message présidentiel semble néanmoins très clair. «En menaçant d’impliquer les citoyens, le président fait pression sur ses adversaires et leur rappelle qu’une grande majorité d’Iraniens l’a élu pour qu’il entame ses réformes», explique Sadegh Zibakalam, analyste politique basé à Téhéran.

Pour la première fois depuis l’élection présidentielle, le guide suprême Ali Khamenei a publiquement critiqué le gouvernement en lui ordonnant de «s’abstenir de mots inutiles».

Au centre de l’échiquier politique iranien, Ali Khamenei a le dernier mot sur la question nucléaire. La moindre concession faite dans les négociations doit préalablement recueillir son aval et, bien qu’il persiste à soutenir les pourparlers, le guide a régulièrement réitéré son «manque de confiance» envers les Etats-Unis. En effet, même si le poids des sanctions internationales a obligé l’Iran à se mettre à la table des négociations, il s’agit avant tout pour le guide de mobiliser une composante centrale de l’identité du régime islamique. Celle qui refuse de capituler face au «Grand Satan» américain.

(24 heures)