France: Les perches à selfie en sursis dans les musées

 

Bon marché, la perche, en fait un bras télescopique, rencontre depuis des mois un énorme succès et elle a été dernièrement une des vedettes du salon d’électronique CES de Las Vegas. Pouvant atteindre 1,50 m de long, elle permet de se photographier avec son smartphone en prenant du recul et en se mettant en scène.

«J’aime prendre des photos dans un musée pour les envoyer chez moi, en Malaisie, et montrer à ma famille ce qu’il y a à voir», raconte Ezad Asri, venu visiter le Louvre. Mais le maniement à proximité des oeuvres d’art de cet instrument, devenu l’accessoire incontournable du touriste, n’est pas sans risque, s’inquiètent les professionnels.

Interdite dans certains musées américains

Plusieurs musées américains ont déjà décidé de l’interdire, comme le MOMA à New York et le Smithsonian qui regroupe plusieurs musées à Washington. Ce dernier présente cette décision comme «une mesure préventive pour protéger les visiteurs et les objets, particulièrement en cas d’affluence». L’interdiction est également en vigueur dans plusieurs musées australiens comme la National Gallery à Camberra. En France, la perche commence aussi à être mal vue.

«Oui, nous conseillons à nos visiteurs de ne pas en utiliser dans les salles», indique-t-on à Versailles, où l’on fait pour l’heure confiance à la «médiation des gardiens». En outre, une signalisation a été mise en place en attendant que le règlement soit modifié lors d’un prochain conseil d’administration. La direction met en avant la spécificité du château, qui accueille 1000 à 1500 visiteurs par jour et présente des objets sans la protection d’une vitrine. Les accès de certaines salles sont aussi très étroits.

«La perche, c’est une bonne idée pour prendre des selfies, mais c’est quelque chose qui peut faire beaucoup de mal si on est dans un petit espace comme un musée», reconnaît Luis Felipe, un touriste brésilien. Plusieurs objets «à risque» sont déjà bannis des grands musées français. Les pieds pour appareil photo n’ont pas droit de cité au Centre Pompidou et au Louvre, qui interdit également les parapluies non pliants, les casques de moto et les gros sacs à dos.

«Charte des bonnes pratiques»

Quant aux bras télescopiques, précise-t-on au Louvre, le musée français le plus visité avec 70% de touristes étrangers, ils «ne sont pas interdits à condition que leur usage respecte le règlement de visite». Celui-ci proscrit notamment de «désigner les oeuvres avec des objets risquant de les endommager, par exemple crayons ou autres instruments d’écriture, cannes, objets de toute nature utilisés par les guides pour guider leurs groupes».

Au Centre Pompidou, on «s’achemine vers une interdiction mais la décision n’est pas encore arrêtée», indique la direction, qui redoute «aussi les sacs à dos et les poussettes». Fréquemment interdite dans les musées il y a quelques années, la photographie des oeuvres et des visiteurs est devenue une pratique très populaire avec l’apparition des smartphones et des réseaux sociaux. Elle est même encouragée par certains musées qui y voient un outil de promotion.

Cet engouement a conduit le ministère de la Culture à publier une «charte des bonnes pratiques», la cohabitation entre les visiteurs-photographes et les autres s’avérant «parfois problématique». Elle stipule que le visiteur doit veiller «à ne pas porter atteinte à l’intégrité des oeuvres» et «ne pas gêner les autres visiteurs». Mais si la charte souligne que l’utilisation de matériel photo supplémentaire, d’éclairage par exemple, nécessite «une autorisation spécifique», elle ne mentionne pas les perches à selfie.

(afp)