
Une fois encore, les manifestations et échauffourées avec la police se multiplient.
Plusieurs associations étudiantes ont voté une grève il y a un peu plus de deux semaines et organisent des débrayages pour protester contre les mesures de compressions budgétaires du gouvernement libéral de la province francophone.
L’Université du Québec à Montréal (UQAM), l’une des quatre universités de la ville, est une nouvelle fois au coeur de la contestation: plusieurs groupes d’étudiants cagoulés ou masqués organisent des piquets de grève, souvent en obligeant des professeurs ou des étudiants à quitter les salles de cours.
Etudiante en 1ère année de droit, Marie-Perle Nadeau appuie la contestation mais désavoue les actions violentes. «Je suis pour les revendications mais contre les blocages» de cours, confie-t-elle à l’AFP dans les couloirs de l’UQAM où les discussions vont bon train.
Le recteur de l’UQAM, Robert Proulx, a obtenu de la justice de prendre toutes les mesures pour faire cesser «toute forme d’intimidation physique ou psychologique» sur les étudiants et les professeurs.
Dégâts importants
Forte de cette injonction, l’université a fait appel à la police qui a investi dans la nuit de mercredi à jeudi un bâtiment occupé par les manifestants, avant de procéder à 22 interpellations en usant de la force.
Si des professeurs s’étaient interposés la veille entre les manifestants et la police, les échanges musclés lors de l’intervention policière ont laissé des traces.
Il y a eu «beaucoup de saccages et des vitres brisées», selon le recteur, qui a décidé de fermer un bâtiment où les dégâts sont importants.
En colère après les violences policières, Alexandre, affilié à un syndicat gréviste, n’approuve pas les méthodes brutales pour faire respecter la grève.
«On ne peut pas accepter la violence», déclare ce jeune, tout en distribuant ses tracts dans les couloirs de l’université au centre-ville de Montréal.
Tournant politique
Le mouvement de ce printemps «est beaucoup plus politique», estime Marie-Perle Nadeau, contrairement à la contestation de 2012 contre la hausse des frais de scolarité que voulait imposer le gouvernement libéral de l’époque et qui a tangué face aux manifestations à répétition avant de tomber trois mois plus tard.
Revenu depuis un an aux affaires, le gouvernement libéral essuie donc une nouvelle crise étudiante. Jeudi, son ministre de l’Education François Blais a soutenu le recteur de l’université désavoué par une partie du corps des professeurs.
«Monsieur le recteur nous vous appuyons et nous sommes confiants que l’université se relèvera de l’affront que quelques individus lui ont font subir», a lancé le ministre en défendant «le droit inaliénable de pouvoir étudier» dans les universités.
En plein mouvement de grève, la direction de l’UQAM a demandé aux professeurs «de dispenser leurs cours (…) et ce, peu importe le nombre d’étudiantes et d’étudiants présents en classe», un message en forme de provocation pour le syndicat des professeurs qui réclame la démission du recteur.
Pour Marcos Ancelovici, professeur de sociologie, le recteur a fait une faute en requérant l’aide des forces de l’ordre et Michèle Nevert, présidente du syndicat des professeurs, dénonce le double discours du recteur qui avoue être «contre les compressions» budgétaires du gouvernement, tout en les mettant en oeuvre.
Torts partagés
Ce n’est «pas le moment de faire un procès d’intention au recteur», estime l’étudiante Marie Tremblay. Selon elle, les dégradations et les violences «donnent une vision anarchique de l’UQAM» dans l’opinion publique.
Son amie Vanessa Colin défend la grève, mais trouve inutiles les manifestations en soirée.
Souvent conclues par des affrontements sporadiques avec la police, ces manifestations ne servent pas de levier politique contre le gouvernement, estime cette jeune fille en espérant passer ses examens pour valider sa première année universitaire.
Il y a deux semaines, une jeune étudiante avait été blessée à la bouche à Québec par un tir d’une cartouche de gaz lacrymogène par la police lors d’une manifestation nocturne.
(afp)