
4 ans 4 mois après le «Baldé gate» , le lycée de la commune de Diawara est encore au cœur d’un nouveau problème d’ordre financier. Pour rappel, le « Baldé Gate » fait référence au détournement de 16 millions des caisses du Collège de Diawara en 2011. Le principal du collège à l’époque avait fait main basse sur la manne financière de l’établissement ( Frais d’inscription et autres ). Traqué et dénoncé par les parents d’élèves, il fût débarqué et bouté hors de Diawara.
Depuis quelques semaines, une nouvelle affaire défraie la chronique dans cette commune. L’argent du lycée est au cœur des débats. L’association des parents d’élèves, non impliquée dans la gestion des fonds, tente de rattraper le coup pour faire la lumière sur les mobilisations des fonds provenant les inscriptions et de la vente des blouses car les caisses sont vides.
Plantons le décor ! « De 2009 à 2015, l’association des parents d’élèves n’a jamais été impliquée dans le comité de gestion du lycée. Il n’ y avait aucun représentant des parents d’élèves au sein de ce comité», dit Wagui Traoré, délégué APE et Vice-président du Conseil départemental de Bakel. Le 25/05/2015, l’APE s’est réunie pour choisir deux délégués dont la mission sera de représenter ladite structure dans le comité de gestion des établissements scolaires. Une mission de contrôle pour prévenir d’éventuelles malversations financières. Faire le point sur la situation actuelle du Lycée de Diawara était également un objectif. Ainsi, le 26/05/2015, les délégués de l’APE à savoir Wagui TRAORE et Hamo SOW ont rencontré le Proviseur M. Bakary TRAORE. Cette entrevue s’est faite en présence de M. Faye ( Professeur et comptable matière ), M. Khalifa KEITA ( Censeur ), M. Younouss Badiane ( Surveillant ), M. Mamadou Hamidou SAKHO ( Coredia).
Qui représentait l’APE dans le comité de gestion ? demandent les délégués de l’APE. Le proviseur répond sans ambages: « Aucune personne représentait ladite structure ». « Il n’y avait pas également de budget prévisionnel lors de ma prise de fonction », soutient-il. Dans ses explications, le Proviseur dit également que l’APE est une structure privée. Donc, en sa qualité de proviseur, il n’est pas tenu de travailler avec l’APE selon l’inspection d’académie.
 Comment avez-vous géré l’argent du lycée? lui demandèrent les délégués de l’APE.
Dans ses explications, le proviseur reconnait avoir encaissé seul les fonds selon l’APE. L’argent en question provient des frais des inscriptions des élèves et de la vente des blouses. Le Lycée compte aujourd’hui 1415 élèves dont 259 élèves dans la seule section Lycée ( seconde, première, terminale). En moyenne, les élèves du CEM cotisent 6000 FCFA tandis que ceux de la section Lycée cotisent 7500 FCFA.« Ce jour, les caisses sont vides », aurait reconnu le proviseur lors de la rencontre avec les délégués de l’APE. « Il n’a pas fait également état de la somme initialement reçue sur les inscriptions» dit un membre de l’APE. En somme, à l’issue de cette rencontre, le proviseur a soutenu que les comptes sont vides. « Aucune facture n’a été produite pour justifier lesmobilisations des fonds » selon l’APE. Aucun relevé n’était également disponible pour justifier les éventuelles destinations des fonds.
Dans le même sillage, le Lycée trainait des impayés de 165.800 FCFA entre Octobre et Mai. Une somme due à la SDE. Cette situation a occasionné une suspension de l’approvisionnement en eau. Les robinets du collège étaient aux arrêts. Après négociation avec les services de la SDE, la situation a été rétablie. Toujours est-il qu’il reste un reliquat de 95.000 FCFA dû à la SDE. Pour rappel, le collège a été raccordé au réseau de la SDE grâce à l’appui de l’association COREDIA. En 2014, la dite association a déloquée une somme de 500.000 FCFA pour les besoins de ce raccordement. L’APE se demande toujours comment une telle situation a pu exister sachant que le proviseur avait encaissé l’argent des inscriptions.
L’autre fait décrié dans la gestion du lycée se situe au niveau de la confection et de la vente des blouses. 800 élèves ont cotisé à raison de 5000 FCFA la blouse. Plusieurs de ces potaches n’ont pas réceptionné leur tenue à l’heure où nous écrivons ces lignes. Une mauvaise qualité des blouses a également été signalée par les élèves. Nos sources nous signalent également que les blouses ont été confectionnées chez un ancien élève du Proviseur répondant au nom d’Oumar DIARRA, opérateur économique à Diawara. Le maitre d’œuvre M. Diarra et le proviseur Bakary TRAORE seraient également issus de la même localité. «Un passe droit entre amis», dit-on.
Suffisant pour que Bakelinfo.com s’intéresse à ce nouveau feuilleton. N’ayant pas pu joindre le proviseur M. Bakary TRAORE après plusieurs tentatives, nous avons contacté M. KEITA, censeur de l’établissement. Après les présentations, nous l’interrogions sur la situation actuelle du Lycée de Diawara. C’est un censeur inquiet que nous avons eu au bout du fil « Les résultats ne sont pas bons. Si nous prenons l’exemple des classes de 3ème, seuls 26 élèves ont obtenu la moyenne sur 250 élèves environs ( 3èmeA : 3, élèves, 3ème B : 14 élèves, 3èmeC : 9 élèves). C’est le même constat dans les autres classes».
Dans ses explications, le censeur pointe du doigt le comportement de certains professeurs. Malgré plusieurs rappels à l’ordre pour que ces derniers fassent bien leur travail, certains n’ont guère daigner suivre les recommandations. Pire, certains professeurs se sont même rebellés contre lui. Ces résultats étaient prévisibles compte tenu de certaines attitudes qui sont légion dans ce Lycée. Les élèves, les premiers concernés, ne mesurent toutefois pas l’ampleur du problème. Ainsi, les membres du gouvernement scolaire sont venus le voir pour faire part de leur intention d’organiser des journées culturelles FOSCO. La réponse du censeur fut sans équivoque. «Vu les résultats, vous ne pouvez plus laisser la place à l’amusement. Il n’y a plus le temps pour les fêtes».
Lors des négociations, le censeur recommanda aux élèves de réduire le temps des journées culturelles en une seule journée au lieu de 3 jours. De plus, il conseilla aux élèves de faire comme leurs homologues de Tuabou qui ont opté pour une journée d’excellence afin de primer les meilleurs élèves. Aussi, conseilla t-il aux élèves de cibler les élèves ayant des lacunes pour l’organisation de cours de renforcement avec l’aide de professeurs encadrants. Les élèves acquiescèrent et retournèrent à leurs occupations. Le censeur prit langue avec le proviseur pour lui faire part de sa rencontre avec les élèves. Ce dernier était en voyage. Au téléphone, il salua l’initiative de M. KEITA et y adhère sans retenue. Toutefois, un intense lobbying de certains professeurs auprès du proviseur retourna la situation en faveur des 3 jours du Fosco. Tout compte fait, trois jours ont été accordés aux élèves à savoir le 11, 12,13 juin pour l’organisation des journées culturelles. Paradoxalement, le 15 Juin, les élèves de Terminale ont rendez-vous à Bakel pour les épreuves physiques du Baccalauréat. «J’étais en contact avec le Maire et d’autres autorités locales pour l’accompagnement de ces élèves en terme d’hébergement et de restauration car certains n’ont pas de parents à Bakel» renseigne le censeur. En somme, l’heure est à la fête au Lycée de Diawara pendant que tous les signaux sont au rouge.
Après ce récit «crève-cœur», nous abordons la question cruciale qui motivait notre appel à savoir la gestion des fonds du lycée de Diawara. Monsieur KEITA déclare : « J’étais gestionnaire du temps du principal Malal DIALLO. J’étais chargé tout simplement de recueillir l’argent des inscriptions pour les verser au principal avec les justificatifs ( Blocs-notes ) à l’appui après une décharge de sa part. Ces deux dernières années, on fonctionnait de cette façon. Avant le départ de Monsieur Malal DIALLO, une passation de service a été effectuée en présence du nouveau proviseur, M. Bakary TRAORE, de M. Djeydi SY, de M. KOITA de Ounoubaba, du comptable matière et d’un inspecteur de vie scolaire de l’’IDEN. Il restait une somme de 18.900 FCFA dans le compte. Le nouveau proviseur avait opté pour une continuité. Il voulait garder la même équipe. Ainsi, cette année, j’ai été également chargé de recueillir l’argent des inscriptions. Avec l’aide d’autres collègues professeurs, avions procédé aux inscriptions. L’argent était donné au proviseur ».
A la question, avez-vous demandé une décharge après la remise des fonds ? Il renseigne: « Je la demandais systématiquement même du temps de Malal DIALLO. A la fin des inscriptions, j’ai demandé une décharge au proviseur. Malheureusement, je ne l’ai pas obtenue. Je l’ai interpellé à maintes reprises devant d’autres collègues au sujet de la décharge mais il me l’a jamais donnée. Néanmoins, j’étais en possession des blocs-notes. Récemment, à la venue du nouvel intendant en la personne de M. Mohamed CISSE, le proviseur m’a demandé de faire la passation en fournissant les blocs-notes. J’en ai profité pour réclamer une décharge devant l’intendant. Surpris, il prétexta l’imminence du match Barcelone Vs PSG pour mettre fin à la réunion. Le lendemain, il est parti à Tamba pour trois semaines. Au téléphone, il me dit qu’il n’est pas tenu de faire une décharge car, hiérarchiquement, il est le proviseur titulaire et que j’étais un simple censeur par intérim ».
Quant à la somme remise en totalité au proviseur, elle s’élèverait à 14.000.000 FCFA environ. Selon le censeur, pour s’inscrire en 6ème, la cotisation était fixée à 11.000 FCFA ( Doits d’inscription 6000 FCFA + Blouse 5000 FCFA ). Pour les 5ème et 4ème, la cotisation s’élevait à 10.500 FCFA ( Frais d’inscription + Blouse ). Les 3ème étaient au même tarif que les 6ème. Pour les élèves du lycée, la cotisation était fixée à 12500 FCFA ( Frais d’inscription + blouse ). «Moi, j’ai décompté 1330 cotisants » dit le censeur. Par ailleurs, il renseigne que certains élèves s’étaient acquittés des droits d’inscription sans paiement de la blouse en début d’année. Ces derniers ont régularisé leurs situations par la suite.« Nous avions établi des listes pour le paiement des blouses moyennant la présentation d’un reçu. Ces listes ont été également remises au proviseur. En somme, ils seraient 1415 élèves inscrits car nous n’avions pas pu établir un bilan réel», dit le censeur. Il continue : « Pour ma part, je n’ai pas touché un franc du lycée. Mon salaire me suffit. Je détiens la preuve de tout ce que j’avance et j’ai des témoins».
D’autres manquements seraient notés dans la gestion du proviseur. Les marchés des abris provisoires, des tables bancs et des blouses auraient été également «surfacturés » selon nos sources.
Quelques heures plus tard, nous tenons M. Bakary TRAORE, proviseur du Lycée de Diawara, au bout du fil. Il nous renseigne : «Un établissement tient une série d’activités durant une année scolaire.Ceci est valable dans tous les établissements du pays. Ce qui fait qu’il y a très souvent des problèmes de liquidités. Quand je suis arrivée à Diawara, je n’ai pas trouvé d’argent dans les caisses. Plusieurs dettes n’ont pas été honorées. A titre d’exemple, on peut citer le salaire du gardien qui n’a pas été payé depuis plusieurs mois. J’ai également financé la fabrication d’abris provisoires avec des équipements modernes. A ma prise de fonction, les machines ( Photocopieuses, imprimantes…) étaient toutes en panne. J’ai procédé à des réparations en faisant intervenir un professionnel de Dakar. Ce dernier effectue des déplacements réguliers pour la maintenance de nos équipements. Nous avons changé à plusieurs reprises les tambours. A titre d’exemple, un tambour coute environ 100.000 FCFA. A cela, il faut ajouter l’achat d’autres consommables dont nous avons besoin au quotidien. Ces dépenses de fonctionnement constituent un poste onéreux pour notre établissement. J’ai effectué également la réparation des tables blancs, de portes et de fenêtres en plus de la collecte de tables bancs depuis Tambacounda. On me reproche de n’avoir pas impliqué l’APE dans le comité de gestion. En début d’année scolaire, nous n’avions pas eu connaissance de l’existence d’une structure de parents d’élèves. Il n’y avait aucun délégué. Néanmoins, il fallait faire des travaux et d’autres démarches comme la collecte de tables bancs. Doit-on bloquer les choses ou continuer le travail malgré le manque d’implication des parents d’élèves? J’ai opté pour la continuité pour ne pas bloquer le fonctionnement normal de l’établissement ».
A la question, avez-vous des factures pour justifier les différentes dépenses effectuées? Il nous renseigne : « Nous avons bel et bien des justificatifs. Â Nous faisons en ce moment même les pointages pour remettre tout à plat. Pour le moment, nous n’avons pas terminé ce travail. Nous avons prochainement rendez-vous avec les parents d’élèves. Nous mettrons à dispositions les résultats de nos différents pointages ».
Toutefois, le proviseur n’a pas été capable de nous donner la somme exacte encaissée au titre des inscriptions et des blouses. ” Je ne peux pas avancer une somme exacte car on a pas fini les pointages”.
Moment choisi pour évoquer l’histoire du marché des blouses confié à un de ses anciens élèves du nom d’Oumar DIARRA. Il hausse le ton : « Ce n’est pas sérieux. Je suis déçu par une telle analyse. Oumar est un jeune opérateur économique à Diawara. Je lui ai confié ce marché parce qu’il a fait montre d’un sérieux dans la gestion de ses affaires à Diawara. On lui avait même confié le marché du nettoiement de Diawara. Ceci montre qu’il n’a pas attendu la venue de son ancien professeur que je suis pour gagner des marchés à Diawara » .
Avez-vous des choses à vous reprocher, M. le proviseur, demande t-on ? Il nous confie : « Oui, ce n’est peut-être pas un reproche mais simplement une déception. Le marché des blouses qui a été confié à Oumar DIARRA souffre de plusieurs manquements. La livraison des tenues a pris beaucoup plus de temps et jusqu’à présent elle n’est pas bouclée. Sur ce point, je ne peux me satisfaire car les choses ne sont pas passées comme on le souhaitait. De plus, un problème de qualité a été relevé également».
Nous avions évoqué également les résultats catastrophiques au Lycée de Diawara durant cette année scolaire. Le proviseur renseigne : Je ne vais pas vous mentir. Les résultats sont médiocres. Dans une même classe, on trouve un élève avec 18 de moyenne dans une matière et un autre avec 3 de moyenne dans cette même matière. Il y a plusieurs facteurs qui expliquent ces résultats. Cette année, il faut savoir que nous avions trouvé une situation complexe en début d’années. 400 élèves devaient être renvoyés du lycée à cause de leur faible moyenne. D’un autre côté, il y a des textes qui favorisent le maintien de ces élèves dans le circuit scolaire. Ainsi, on s’est retrouvé avec plusieurs élèves d’un très faible niveau. Cela ne date pas d’aujourd’hui. Il s’agit de lacunes accumulées depuis plusieurs années. Je vais vous raconter une anecdote. Hier, lors des journées culturelles du gouvernement scolaire, une question a été posée à savoir quelle était la capitale des USA. Un élève de quatrième a répondu : « le Canada ». Ceci montre combien le niveau est faible. Le mal est profond et ne peut être imputé à ma seule personne. De plus, les états unis sont dans le programme de la 4ème Par ailleurs, il faut noter qu’au lycée de Diawara, les élèves ont presque terminé les programmes. Plusieurs professeurs ont donné leurs derniers cours donc aucun problème n’existe sur ce plan. Les classes de troisième ont également terminé le programme».
Et s’il s’agissait d’une combine des professeurs pour faire exclure plusieurs élèves afin de les «récupérer» à l’école privé «Lumières », tenue par certains professeurs, se demande t-on ? Il botte en touche : «Cher Monsieur, je n’ai aucun intérêt dans cette école privée. Je n’y dispense pas de cours. Je ne donne pas de notes aux élèves. De plus, les professeurs sortent en majorité de l’école normale supérieure. Ce sont des responsables qui ont pris l’engagement d’enseigner. Ce n’est pas à moi de leur apprendre la déontologie qui sied à la profession. Croyez-moi, je suis plus que préoccupé par le situation des élèves.J’ai fait plusieurs analyses pour comprendre la différence de niveau dans les classes afin d’y remédier. J’interroge les professeurs pour comprendre la situation de ces résultats. Mais, l’équation demeure complexe ».
Concernant l’organisation des journées culturelles, le proviseur renseigne que les professeurs ont terminé les programmes. Il reconnait que cela fait désordre pour les classes d’examen comme la termine. Seulement, la terminale est une compasante de l’école et ne représente pas toute l’école. Il avait souhaité une journée d’excellence mais finalement il a respecté les textes qui donnent le droit au gouvernement scolaire de fêter ces journées.
Une chose est sûre. Nous sommes qu’au début de cette histoire. Plusieurs questions restent en suspens. La balle est dans le camp de l’APE. Une confrontation est prévue prochainement entre les differents protagonistes pour élucider les mobilisations effectuées par le proviseur. Nous y reviendrons.
Toutefois, Diawara n’a pas retenu la leçon de l’affaire ” BALDE GATE”…Mieux vaut prévenir que guérir !
Samba KOITA dit EYO, www.bakelinfo.com /