GRÈVE GÉNÉRALE: La Belgique transformée en un pays fantôme

 

 

Zéro avion, zéro train, quasi aucun bus et métro, et cela à l’échelle de tout le pays. La Belgique était totalement paralysée hier par la grève générale convoquée par les syndicats pour dénoncer un plan d’austérité prévoyant 11 milliards d’euros d’économies sur cinq ans. Les écoles, crèches, prisons, administrations ont suivi la grève, tout comme les hôpitaux qui ont annulé les consultations et opérations non urgentes. Les grands ports de Zeebruges et d’Anvers, importantes dessertes commerciales de l’Europe, étaient également à l’arrêt. Des barrages ont été formés à l’entrée des entreprises, et de nombreux commerces sont restés fermés. Bref, toute la Belgique avait, hier, des airs de pays fantôme.

Ce bras de fer dure depuis des semaines, avec des actions qui sont montées en puissance chaque lundi. A peine formé, en octobre, le nouveau gouvernement de coalition de Charles Michel, constitué des libéraux, des démocrates-chrétiens flamands et des nationalistes flamands de la N-VA, a mis sur pied un plan d’économies ainsi qu’un projet repoussant l’âge de la retraite de 65 à 67 ans. Hier, les syndicats ont qualifié d’«historique» la mobilisation, et promis qu’un nouveau plan d’action sera mis en place dès janvier si le gouvernement ne sort pas de son «autisme».

Laquelle des deux parties tiendra sur la longueur? A en croire les sondages, les Belges ont peu de sympathie pour ce mouvement de grève, mais le fragile gouvernement de coalition n’est pas en très bonne posture non plus pour fermer la porte à la négociation. «En Flandre, le syndicat chrétien participe très activement à la grève, alors même que les démocrates-chrétiens, parti auquel il est lié, est au gouvernement. Quant aux nationalistes flamands de la N-VA, ils doivent ménager leur base électorale: ils savent qu’on trouve de nombreux grévistes parmi leurs sympathisants», relève Dave Sinardet, professeur de sciences politiques à l’Université libre de Bruxelles.

La coalition au pouvoir qualifie le mouvement de grève de «politique», accusant les socialistes et les syndicats d’avoir pour unique but de faire tomber le gouvernement. «Mais cette posture est un peu faible, poursuit Dave Sinardet. Les Belges sont certes partagés sur cette grève, ils savent qu’il faut faire des économies, mais ils trouvent aussi que le plan est déséquilibré. Ils reprochent au gouvernement d’épargner les grosses fortunes et les grandes entreprises à cet effort collectif.»

Quant aux nationalistes flamands, «ils auraient rêvé que la grève n’affecte que la Wallonie, traditionnellement plus encline que la Flandre à participer aux mouvements sociaux, pour jeter de l’huile sur le feu du débat communautaire. Mais cela ne prend pas: on voit bien que la grève a été très bien suivie, partout.»

(24 heures)