«La double prise d’otages, on y était préparé»

 

Marc (prénom d’emprunt) est un ancien officier du Groupement d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN). Il occupe actuellement un poste important à Genève où il est en charge de la sécurité pour le compte d’une organisation internationale. Il a été recruté pour son expérience. Amené à se déplacer régulièrement sur des terrains difficiles et à coopérer avec de nombreux services de police étrangers, il est aussi directement impliqué dans les dispositifs de prévention et de lutte contre le terrorisme. Ses collègues français avec qui il est resté en contact étaient-ils préparés au scénario d’une double prise d’otage, comme cela s’est passé hier? «Oui», répond-t-il.

«Ces dernières années, nous avons beaucoup travaillé sur des scénarios de prises d’otages massives, mais aussi sur des hypothèses de crises simultanées», explique cet expert en sécurité, lui-même formé à faire face à ce type de situations. «C’est parce nous avions pris conscience de cette menace que les effectifs du GIGN avaient été triplés et qu’un rapprochement avait également été opéré avec les hommes du RAID, du Groupement d’intervention de la police nationale (GIPN) et de la BRI», poursuit Marc. «La France est en capacité de faire face à plusieurs prises d’otages. Il pourrait y en avoir trois ou quatre en même temps, nous avons les effectifs pour faire face. La seule chose que nous n’avions peut-être pas imaginée, c’est qu’il puisse y avoir un lien entre les auteurs de deux actions menées simultanément et qu’un chantage puisse être exercé pour dissuader les forces de l’ordre d’intervenir d’un côté ou d’un autre», admet-il. Un détail qui n’était, cependant, pas de nature à remettre en cause les schémas tactiques préparés et sans cesse répétés lors d’entraînements très poussés, comme l’ont montré les équipes qui sont montées à l’assaut de la supérette de Vincennes et du bâtiment industriel de la zone artisanale de Dammartin-en-Goële dans lequel s’étaient réfugiés les frères Kouachi après leur expédition sanglante dans les locaux de Charlie Hebdo.

«Les périmètres de sécurité étaient bien établis. Il ne restait plus qu’à passer à l’action. Le commandement opérationnel a lancé les deux assauts en même temps. Les preneurs d’otages étaient des jusqu’au-boutistes et des vies étaient en danger. Les autorités ont jugé qu’il fallait agir vite», commente Marc.

Les forces de sécurité voulaient à tout prix éviter de voir se reproduire un scénario à la Mohamed Merah avec un siège qui s’éternise et une issue peu glorieuse. Le risque existait. «L’homme retranché dans la supérette avec plusieurs otages avait des vivres à disposition. Il aurait pu tenir longtemps et donc retarder d’autant l’assaut contre ses comparses. «Ce qui était inimaginable», dit Marc.

(24 heures)